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La Lettre d'Expression Médicale
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 N° 455
 
 
 
    3 juillet 2006
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Systémiquement parlant (2)

Docteur François-Marie Michaut Lui écrire

La réponse à la LEM 453 Systémiquement parlant (1)a été foudroyante. En voici un résumé très grossier, complété depuis peu par une foule d’interventions très pertinentes sur la liste Exmed-1 : « Ce que vous racontez là sur les systèmes ressemble beaucoup trop à un jeu intellectuel pour que je me sente concerné. Moi, je suis ou un utilisateur de la médecine, ou un soignant. En quoi un tel mode de vision des choses peut-il bien m’apporter un plus sensible par rapport à ce que je connais ?». Je ne saurais trop remercier ceux qui ont ainsi pris la peine d’établir une véritable interaction, car c’est ainsi que nous allons pouvoir tenter d’aller plus loin. Autrement dit, au lieu, comme dans un cours magistral, de suivre imperturbablement le plan établi par l’auteur afin de traiter son sujet de la façon la plus complète possible, et dans les règles strictes de sa discipline, nous allons pratiquer autrement. A tout propos émis ici, vous avez la possibilité de faire connaître de quelle façon vous y réagissez. En d’autres termes à une action, celle de l’auteur d’exprimer une idée sur cette lettre, va répondre en retour la ou les réaction(s) de chaque lecteur. La communication, au lieu d’être à sens unique, comme celle, trop fréquente, du médecin à son patient par exemple, fonctionne ainsi dans les deux sens pour créer une authentique interaction. Une vraie communication qui n’est ni propagande orchestrée, ni manipulation prévue à l’avance pour obtenir tel ou tel résultat.

retrouver la confiance

Là, nous ne sommes pas dans l’abstraction intellectuelle, mais dans le fonctionnement des relations dans le vivant. Quand un journal traditionnel nous propose un article, le message va dans un sens unique. De l’auteur émetteur actif vers le lecteur récepteur passif. Dans le déroulement d’une consultation, telle qu’elle est enseignée aux jeunes médecins, et qu’il la voit généralement pratiquer à l’hôpital, il en va de même : celui qui sait ( le docteur) parle, celui qui reçoit est prié d’être convaincu ( le bien dit ... patient ). Ce mécanisme est de la plus haute importance. Le médecin se sent , par l’idée intérieure qu’il a de sa fonction, et par ce qu’il faut bien nommer son dressage, obligé en toute circonstance de détenir “la vérité”, “ le bon diagnostic”, “le conseil juste”, la “réponse immédiate” etc... Dans sa tête, il ne reste alors plus guère de place, et ce d’autant plus qu’il est peu expérimenté, pour pouvoir accorder la moindre confiance, ni même la plus petite importance, à ce que peut lui dire le patient en face de lui. Comprenons-nous bien : ici c’est au médecin de “retrouver la confiance” dans ce que lui communique son malade. Il est évident que cette communication est loin d’être toujours verbale ( digitale disent les savants), et qu’elle est bien plus souvent gestuelle ou ... en actes, comme des rendez-vous manqués, des traitements non pris etc ... Autrement dit : analogique. Toute une interprétation s’impose alors, avec tous les risques de fausse piste et d’incertitude que cela comporte. Voilà qui semble mal aller dans le sens d’une EBM ( médecine fondée sur des évidences) si à la mode.

restaurer la conscience

Pourtant, l’étude universitaire de la majorité des phénomènes du vivant nous familiarise avec la notion de rétroaction. Par exemple, et très grossièrement, la glande thyroïde ne se met à sécréter ses hormones que quand l’hypophyse lui envoie son signal de stimulation. Cette dernière glande est elle même sous le contrôle hormonal du diencéphale qui reçoit ses informations de multiples récepteurs périphériques. Et réciproquement aurait obligatoirement, et judicieusement, ajouté notre ami Pierre Dac, car nous sommes dans des systèmes biologiques où se régulent mutuellement une action et une réaction. Action et rétroaction s’enchaînent. Très vite, cependant, le praticien en exercice est bien obligé de prendre conscience que le patient qu’il voit, déjà si difficile à “décrypter” n’est pas une entité dans le vide séparée de tout son contexte personnel de vie. Du temps de ses études, l’entourage du malade qu’il soit social, familial, culturel ou professionnel, n’est resté qu’une formule très accessoire, au même titre que le classique “ les facteurs psychologiques” invoqués dans de multiples pathologies. Autrement dit, on parle de tout cela, mais sans donner au futur praticien la moindre clé que sa bonne volonté ou son “bon sens” pour naviguer sans faire de dégâts dans ce monde sans limites de l’entourage du malade. Ce qui aggrave la perception des proches du patient par les membres du corps médical, c’est que les familles et les amis sont traditionnellement - des exceptions remarquables existent - considérés comme des gêneurs probables, et non comme des acteurs utiles, par le milieu hospitalier.

renforcer la compétence

Il est indispensable que tout professionnel du champ de la santé commence par devenir un très bon technicien dans son domaine d’action. On ne s’improvise pas du jour au lendemain infirmier, psychologue, kinési, ou chirurgien cardio-vasculaire sans se plier à l’acquisition de multiples savoirs théoriques et pratiques. Tous nos systèmes actuels de formation assurent du mieux qu’ils le peuvent cette mission. Là où les choses deviennent beaucoup plus difficiles, c’est quand il faut faire coïncider ce bagage initial avec la vie professionnelle telle qu’elle est, c’est à dire, le plus souvent, en dehors du cocon protecteur et réducteur de l’hôpital nourricier. Ce sont vraiment d’autres compétences qu’il faut renforcer. Autrement dit, le stade personnel du bon élève bien obéissant à tout ce que ses maîtres lui ont appris doit absolument être franchi. Des dogmes, des habitudes, des imitations, des certitudes sont alors mises en question. C’est un état d’esprit, déjà systémique dans ses interrogations, qui ne plaît pas du tout, mais alors pas du tout, à ceux qui sont persuadés d’exercer le monopole de la formation médicale ( ou infirmière ou psychologique, ou dentaire, vétérinaire etc... ).
Fidèle à la méthode décrite au début de cette lettre, ce propos n’aura une suite dans un Systémiquement parlant (3) que dans la stricte mesure où vous en déciderez ainsi en donnant votre point de vue personnel. Et le contenu même du propos sera élaboré en fonction de vos éventuelles réponses, critiques, suggestions et questions.
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NDLR : Comme l'Internet est le moyen idéal pour le faire, il ne faut vraiment pas s'en priver, ami lecteur. Si ce texte vous touche, vous plaît, vous déplaît ou vous semble mériter telle ou telle réponse, d'un simple clic sur le lien "Lui écrire" en haut de page, un courrier électronique de votre part parviendra à l'auteur.
FMM, webmestre.

 


Pour ceux qui ne connaissent pas encore notre Charte d’Hippocrate.

Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html




Os court :« Il ne faut pas laisser les intellectuels jouer avec les allumettes. »
Jacques Prévert


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