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 N° 475
 
 
 
    3 décembre 2006
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Le docteur Guy Sharf

Docteur François-Marie Michaut lui écrire

Voilà un nom qui ne dit probablement plus rien à nos médecins en exercice. Et pourtant, nous lui devons tant, nous les médecins généralistes. Qui était-il ? Et bien un vrai médecin installé et exerçant en cabinet et à domicile à Woipy en Lorraine. Bien que submergé de travail comme l’étaient les confrères d’après-guerre, il eut encore le souçi de devenir syndicaliste.

retrouver la confiance

Souvenons-nous. C’était en 1960 la grande époque de la première convention d’exercice entre les médecins libéraux et l’assurance-maladie aux ordres du pouvoir politique en France. En ce temps, un seul poids lourd syndical médical existait : celui de la confédération des syndicats médicaux français (CSMF ) sous la houlette du Docteur Jacques Monier. Des médecins s’exprimant d’une seule voix , un rêve pour les négociateurs. Du côté des médecins, c’était ainsi le point de vue des spécialistes qui devenait dominant. A l’époque, et ce fut longtemps la règle, la consultation de n’importe quel spécialiste était deux fois mieux rémunérée - et remboursée - que celle du généraliste. Cette option, lourde de conséquences sonnantes et trébuchantes pour l’orientation professionnelle des étudiants, en dit long sur le peu de cas qu’on a fait alors de la médecine générale.

restaurer la conscience

Notre ami Guy Sharf ne s’est pas laissé impressionner par cette attitude. Il avait une telle conscience aiguë de la valeur de la médecine générale qu’il est devenu le leader de la petite section des généralistes de la puissante CSMF. Il s’agissait de l’UNOF ( union nationale des omnipraticiens français).
Rendez-vous compte : on n’osait même plus parler de médecine générale, tant la dénomination était péjorative ! Même pas nommable, quel mépris de la part des puissantes blouses blanches. Alors, pitié, amis du XXI ème siècle, gardons-nous bien de l’illusion nostalgique d’un glorieux passé de notre métier. Cela n’a jamais existé !

renforcer la compétence

Tout était demeuré parfaitement figé et immuable du côté de l’université comme des politiques : mai 1968 n’avait rien changé. C’est du côté de la presse médicale que les choses ont commencé à bouger. Un journal spécifique “ Le Généraliste” est apparu en 1976. Pour la première fois, nous avons pu commencer à nous vivre au grand jour comme une profession indépendante. Le courrier des lecteurs, ainsi que les articles publiés par des confrères généralistes en exercice ( une grand première incroyable ), ont constitué le début d’une somme énorme, et jusqu’alors impossible, de contacts entre nous.
C’est à la faveur de ce vecteur d’expression que j’ai pu échanger avec Guy Sharf une correspondance personnelle qui m’a beaucoup apporté. Une de ses réflexions m’avait alors beaucoup choqué. Pour lui, la reconnaissance indispensable de la médecine générale dans le domaine de la santé ne peut se faire que comme une lutte de classe. Les relents quelque peu staliniens de son propos m’ont longtemps empêché d’en saisir la profonde vérité et le côté prophétique. Cette lutte, notre lutte de prolétaires du stéthoscope, devrait-elle être purement politique ou syndicale ? Guy Sharf a pris le pari que la seule réponse possible était la matière grise spécifique des généralistes. C’est pourquoi, hors de la voie syndicale, il s’est profondément investi dans la formation médicale, devenant avec Pierre Gallois et Louis Hercek l’un des créateurs de l’UNAFORMEC : union nationale des associations de formation médicale continue. Là encore, en marge de l’université et de l’hôpital, un rassemblement des multiples initiatives individuelles locales.
Alors, continuons d’accumuler l’expression de cette matière grise et de cette pâte relationnelle typiquement généraliste. C’est notre seul capital. Peu importe qu’il soit dédaigné par nos confrères spécialistes, arque boutés sur ce qu’ils pensent être leur suprématie. Peu importe que notre discipline soit considérée comme sans valeur par ceux - où qu’ils soient - qui ont un tiroir-caisse ou une calculatrice en guise d’âme et d’esprit. Car, ainsi, peu à peu se renforce une vision plus exacte, donc aussi infiniment plus complexe et plus riche que ce que croient beaucoup, de ce magnifique métier que devrait devenir celui de médecin généraliste bien dans sa peau.

 


Pour ceux qui ne connaissent pas encore notre Charte d’Hippocrate.

Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html




Os court : «Qui aime bien ses lunettes ménage sa monture. »
Francis Blanche


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