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 N° 552
 
 
 
    9 juin 2008
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Urgence !

Photo de l'auteur Docteur Françoise Dencuff lui écrire

Le mot urgence vient du verbe urgeo (urgueo), ursi, ere : peser sur, pousser, accabler ; poursuivre, talonner ; hâter, s'occuper sans relâche de, insister sur ; être pressant, être urgent, être menaçant ; insister, serrer de près.
Le moins que l' on puisse dire c' est que notre Georges Clooney national a compris le message. Sa réponse aux propositions du rapport Larcher sur les communautés de territoire commandé par le ministère de la santé est on ne peut plus... menaçante : il engage les patients à porter plainte contre les Agences Régionales d' Hospitalisation pour « perte de chance ».

retrouver la confiance

Plutôt que nous lancer dans un débat stérile sur les jeux de pouvoirs de certains d' entre nous, médiatiquement séduisants, il est intéressant de décoder ce que les urgences ont de si « politiquement correct » dans notre société.
Depuis quelques décennies la médecine s' est lancé un grand challenge : sauver tout azimut. Dans un monde caractérisé par une volonté sans cesse affichée de sécuriser les citoyens, les urgences sont devenues l' emblème de la « vraie médecine ». A tel point que les maux quotidiens qui nous empoisonnent la vie, et constituent le fond de clientèle des généralistes, sont qualifiés de bobologie. Terme méprisant tant pour les patients que pour les médecins.
Il ne peut y avoir de véritable combat sans des adversaires à la hauteur. Qui mieux que les urgentistes peuvent prendre ce rôle? Les séries télévisées ont bien entendu renforcé l' image de ces héros des temps modernes. Vite, toujours plus vite dans une ambiance de fin du monde.
Bien loin des attaques sur les compétences, la disponibilité, les revenus des médecins, les urgentistes jouissent de la faveur inconditionnelle du public.

restaurer la conscience

Il est évident que les urgences existent en médecine mais beaucoup moins souvent que l' on ne pense. Certes une rupture cardiaque peut passer pour telle, sauf que si vous ne pouvez pas trouver un nouveau cœur votre urgence se transformera illico en avis de décès malgré une réanimation parfaite. Moins dramatique, qui penserait qu' une simple fracture du nez est une urgence à traiter dans les 6 heures ?
L' encombrement des services d' urgence prouve chaque jour que ce ne sont pas les urgences qui sauvent des vies mais les réanimations dans les ambulances des SAMU et autres SMUR et la compétence des médecins régulateurs.
La grande différence entre les fictions américaines et la réalité des urgences françaises tient à la prise en charge des patients. D' un côté on ramasse tout et on fonce et il vaut mieux que les urgences soient sur le pied de guerre. De l' autre, on stabilise le patient sur place et on arrive tranquillement aux urgences qui ont tout le temps nécessaire... pour contacter les services spécialisés.

renforcer la compétence

Alors faire croire aux Français qu' il y a perte de chance n' est peut-être pas très malin. Le véritable problème dans les services des urgences tient surtout à leur encombrement par des patients qui n' ont rien à y faire. A quand une plainte pour perte de chance d' un accidenté avec fracture du nez qui aura poireauté pendant plus de 6 heures à cause de bouchons d' oreille et autres indigestions ?
Il est vrai que les médecins n' ont plus guère envie de se déplacer la nuit. Simple lassitude, besoin de repos, crainte pour leur vie dans certains quartiers ? Et si les médecins s' étaient eux aussi laissés manipuler par la civilisation des loisirs ?
Alors oui ! Il y a Urgence, tout est à revoir. Prendre le temps de se poser les bonnes questions. Revoir la formation pour que les généralistes redeviennent les vrais médecins, les interlocuteurs privilégiés pour tout ce qui ne relève pas de l' urgence vitale. Faire des campagnes d' information en direction des patients.
Mais dresser les malades contre le système de soins par idéologie politique est dangereux et éthiquement contestable. Diviser pour mieux régner était la maxime du sénat romain, il me semble que cette citation de Machiavel reste dans ce cas plus que jamais d' actualité : ceux qui de particuliers deviennent princes seulement par les faveurs de la fortune ont peu de peine à réussir mais infiniment à se maintenir !



Pour ceux qui ne connaissent pas encore notre Charte d’Hippocrate.

Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html




Os court :<< L'homme absurde est celui qui ne change jamais. >>
Georges Clémenceau, médecin, homme politique et journaliste.


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