Futurs médecins,
soyez bien venus

13-15 août 2012
Docteur François-Marie Michaut
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Vivent les vacances, chantions-nous, en mettant les cahiers au feu, et, cruauté de l'enfance, la maîtresse au milieu. Une nouvelle promotion de bacheliers (environ une cinquantaine de mille) a fait le choix de se lancer dans des études médicales, et va prendre prochainement le chemin de la fac.
Comme des athlètes avant des jeux olympiques (la comparaison n'est pas incongrue tant réussir le cursus médical se révèle un drôle de sport) ils sont encore en phase de préparation. Donc, au moins en théorie, encore un peu disponibles pour réfléchir à leur projet de vie avant de se lancer dans la bagarre impitoyable de la compétition.
   Entendons-nous bien, il n'est pas question ici de formuler quelque vérité absolue ou une brassée de conseils. Non seulement je n'ai aucune autorité pour le faire, mais de plus je ne me sens aucun droit - y compris lié à l'âge- pour coiffer une casquette de conseiller habile ou d'expert qu'il faut croire sur parole.

Retrouver la confiance

Il n'existe bien entendu aucun étudiant standard à qui il serait légitime de s'adresser pour que cela convienne à plusieurs dizaines de milliers de destins personnels. Faut-il pour autant se taire, et laisser nos armées d'apprentis carabins se débattre seuls dans un univers qu'ils ne connaissent que de loin ?
Je ne le crois pas. La moindre des politesses est de saluer les jeunes gens qui manifestent leur volonté de consacrer leur vie à soigner les hommes atteints par la maladie ou l'infirmité. Dans un monde qui ne semble jurer que par le pouvoir sur les autres, l'acquisition de biens matériels et l'accumulation d'argent, ceux qui se tournent vers l'aide aux autres ne sont pas des gens comme les autres. Ils méritent notre respect, et notre reconnaissance. Cela peut sembler bien banal de le dire, tant le propos semble couler de source. Une société sans médecins est devenue impensable.
   Mais ne pas en parler, surtout si on a soi-même passé sa vie à exercer la médecine, c'est ne pas reconnaître la valeur bien particulière d'un tel engagement au profit de la collectivité et des personnes.
Qui que vous soyez aujourd'hui, quelle que soit la tournure que prendront vos études, vous incarnez un projet de vie plein de générosité et d'altruisme. Sachez-le bien, personne n'a et n'aura le droit de vous en dépouiller, même si la vie, finalement et bien malgré vous, vous conduit bien loin de la médecine dont vous rêvez.

Restaurer la conscience

Médecins de demain, comme vous qui ne le deviendrez pas, vous êtes venus. Bien disposés à en découdre (intellectuellement) pour faire partie de ceux qui auront la meilleure note aux concours universitaires.
Vous ne pouvez-pas être sur les bancs de la faculté par hasard, ou parce que vous ne savez pas quoi faire dans la vie.
Le classement guillotine pour accéder en deuxième année vous angoisse. Comment peut-il en être autrement ?
Des études engagées sous le signe d'une telle terreur d'élimination brutale peuvent-elles vous donner le sentiment que vous êtes bienvenus ?
À l'évidence, non.
   Si vos professeurs-juges ne peuvent guère, et ce n'est pas de leur faute personnelle tant vous êtes nombreux, vous renvoyer une bonne image de vous et de votre avenir, il ne vous reste qu'à la chercher ailleurs.
Nous sommes bien d'accord, la priorité absolue est de passer le concours de PCEM1. Le programme est pléthorique, il fait appel à un énorme effort de mémoire : tout votre temps doit y être consacré, de façon quasi monastique, sans la moindre dispersion.
   Puisqu'il vous reste quelques instants de disponibilité, arrêtez-vous sur le titre de ce papier. Ce qui vous est souhaité, c'est d'être les bien venus.

Renforcer la compétence

Si la moulinette des épreuves sélectives de début puis de fin d'études ne vous laisse pas entièrement vidés de toute pensée personnelle (hélas, ce n'est pas exceptionnel), la voie vous est ouverte de bien venir à une vie médicale riche et épanouissante.
Ne comptez pas trop sur ceux qui vous entourent pour y parvenir. Les routines s'installent vite, et vous endorment sans faire de bruit.
Les professions de santé, les médicales comme toutes les autres, sont loin d'être parvenues au degré de perfection que nos sociétés sont en droit d'attendre.
Il est si facile quand on débute de penser qu'on en sait infiniment plus que les anciens ! Aucune génération, dont la mienne, n'a évité ce travers.
Si ceux qui vous ont précédé depuis des siècles n'étaient pas tous des ignorants et des obscurantistes, sans eux, et leurs questions et leurs erreurs, nous ne saurions rien.
À vous, les plus jeunes, de reprendre le flambeau. Les territoires inexplorés, ou presque, de la médecine, tant dans le domaine scientifique que dans celui des pratiques, vous l'apprendrez peu à peu, sont gigantesques.
Le monde dans lequel vous cherchez votre avenir n'est pas achevé. Vous avez toute la place d'exercer votre intelligence et votre talent à vous. À vous de venir bien par vos propres ressources et à vos propres yeux, personne ne peut ni ne doit le faire à votre place.

(Cliché exmed)


Os court : « J'adore les surprises, et quand on ne me les fait pas, je les provoque pour me les faire à moi-même.»

Pierre Dac


Cette lettre illustre notre Charte d'Hippocrate.
Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html

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