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Lettre d'Expression médicale n°156

Hebdomadaire électronique francophone de santé . 6 juillet 2000

Comité éditorial : Pr Jean-Paul Escande (Paris-Cochin), Paul Fabra (Paris), Odile Marcel (Lyon III)

Directeur François-Marie Michaut (MD), 4 bis rue Saint Michel, 17000 la Rochelle (France).

Téléphone, répondeur, télécopieur : + (33) 5 46 27 01 98
Consultation des archives de la LEM

 

Un Exmed tout neuf

Dr F.M.Michaut

Cela avait été annoncé ici il y a plusieurs semaines. C'est maintenant devenu une réalité bien palpable. Le site Exmed a profondément remanié sa présentation sur l'Internet. Inutile de cacher que nous sommes très fiers de la qualité du résultat obtenu ! Cela devrait encore inciter les internautes curieux des questions touchant à la santé, et ne trouvant pas exactement ce qu'ils cherchent dans les publications traditionnelles à s'y rendre plus nombreux et plus souvent pour en découvrir les multiples aspects. Dans ce travail, notre LEM, véritable fil d'Ariane d'Exmed, n'a pas été oubliée, comme peuvent le constater directement ceux qui la consultent sur le Web. Vous qui nous aidez par votre fidélité à faire vivre le site Exmed devez être informés de son rayonnement. Grâce à l'analyse automatique d'activité fournie par Funnel Web 3, nous savons qu'il y a chaque jour 219 connexions d'internautes à Exmed. De novembre 1999 à juin 2000, il y a eu 12 992 visites, qui ont totalisé 26 167 pages consultées. Nos visiteurs internautes proviennent des cinq continents et de 14 pays différents. La diffusion de l'information par le Net n'est donc pas une légende, nous en constatons expérimentalement la réalité. Ceci n'est probablement qu'un début, et la Toile francophone de santé, vaste ensemble dont nous sommes une petite partie, ne peut que se développer encore largement.

 

Retrouver la confiance

- " La santé au prix de la liberté ? " s'interroge J.J. Wunenburger, Professeur de Philosophie à l'Université de Bourgogne ( JALMAV n°19- déc 1989 ) ... " Le processus thérapeutique ne s'achève en effet pas par la seule réussite du médecin à triompher d'une maladie ( position de maîtrise institutionnelle où la Vie demeure pensée abstraitement ), mais par le retour à une autonomie du malade, qui après avoir traversé l'épreuve de la dépendance, intériorise et subjectivise à nouveau la Vie, et devient en quelque sorte le médecin de soi-même, c'est à dire acquiert la maîtrise de la vie..." Transmis par Odile Marcel

 

Restaurer la conscience

- " La médecine confisquée par les systèmes " écrit dans le Monde du 3 juillet Jean Lacau Saint Guily, chef du service d'ORL de l'hôpital Tenon à Paris. « On attend des médecins tous les éléments d'excellence d'une médecine lente. Mais on juge leur action en terme de surcroîts permanents de productivité et de capacité à se plier à des recommandations de comités... Le noyau dur de la médecine reste ce contact entre un malade et un soignant : une relation complexe entre deux personnes et souvent, en plus, une action directe sur un corps malade... Nous pensons qu'il y a toujours une place essentielle pour une dimension artisanale de la médecine privilégiant la relation interpersonnelle sur les impératifs économiques, privilégiant l'exercice concret des responsabilités de chacun sur les systèmes théoriques à la recherche incessante du bien et du meilleur ... » Transmis par Odile Marcel

 

Renforcer la compétence

- Trouver rapidement les informations précises dont on a besoin en matière de santé est un impératif pour les professionnels de la santé. Un tel travail de documentation ne peut que bénéficier des aides de l'informatique. Avec nos collègues les Médecins Maîtres-Toile francophone, nous mettons à la disposition de chacun un moteur de recherche, disponible notamment sur Exmed, pour trouver rapidement, au moyen de mots clés, les informations les plus pertinentes et les plus récentes parmi les 6 000 pages de nos 32 sites. Si vous voulez tester cet outil de travail gratuit, veuillez cliquer ici.

 

Os court : « En dépit de leur nom tous les virus ne sont pas des sexes masculins d'origine soviétique. » Pierre Dac

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LEM 157 du 10 juillet 2000

Promouvoir le systémique

Dr Yves Adénis-Lamarre

Le sujet ne mobilise pas beaucoup les foules. Comme M. Jourdain , la plupart des médecins font de la médecine systémique sans le savoir. Mal. Quand on connait les règles de grammaire, c'est quand même mieux.. Apprendre la systémique sans qu' en haut lieu on en parle, cela ressemble à du masochisme si on n'en voit pas l'utilité. Et elle n'est pas évidente au premier abord. En haut lieu aussi on ne souhaite peut être pas que les médecins abordent un sujet trop dangereux. Les médecins sont des chefs d'entreprise et non des salariés. Quels peuvent être les buts de l' approche systémique? Mieux répondre à l'attente des patients et donc mieux les soigner. Avoir une meilleure formation médicale continue (FMC). Mieux se défendre dans le cadre du système de santé. Qui peut être en priorité intéressé par l'approche systémique? Les médecins qui veulent avoir une approche globale (cartésienne et systémique). Les médecins qui organisent les FMC et les syndicats qui défendent les médecins. Quels sont les éléments de l'approche systémique qui sont les plus assimilables pour servir de tremplin à la découverte de l'abord systémique? La notion de paradoxe et son explication systémique? La notion de l'abord de la résolution des problèmes par les objectifs à atteindre pour ensuite sélectionner les éléments qui permettent d'atteindre ces objectifs, seule façon de naviguer dans les systèmes complexes comme la FMC moderne.

Retrouver la confiance

- « Avec des concepts comme celui de " responsabilité collective du corps médical" ), l'assurance maladie (SS) utilise déjà les outils de l'approche systémique dans le cadre de l'organisation du système de santé . Face à elle, les médecins ne peuvent rien faire s'ils n'utilisent pas les mêmes outils. Il est évident que la SS a un "chef" qui peut choisir un chemin dans le cadre du système de soins, mais que les médecins n'ont pas de "chef". La variété de leurs points de vue ne peut que nuire aux médecins. Ainsi, l'informatisation des médecins est un objectif dans le cadre du système de soins, la SS choisit un objectif précis : la télétransmission, puis choisit les éléments pour atteindre ses objectifs; pendant ce temps, les médecins se perdent en conjecture pour savoir comment communiquer entre-eux, ce dont se fout royalement la SS, ce n'est pas son objectif du moment.

Restaurer la conscience

-Alors que la SS devrait être à niveau égal avec les médecins au niveau du système de soins , c'est à dire qu'il devrait y avoir un donnant donnant par exemple télétransmission contre communication entre les médecins, l'un et l'autre favorisés par l'action d'un gouvernement efficace. L'absence de prise en compte de la part des syndicats médicaux de la dimension systémique de la communication fait qu'il y a inégalité dans le combat et que celui qui sait donc la SS peut tricher.

Renforcer la compétence

-Autre exemple, la "médecine par les preuves" dont se targue l'industrie pharmaceutique. Une preuve doit être à 100%, ce qui est possible dans un système simple. Dans les systèmes complexes, les

preuves n'ont plus cours. D'un coté on nous dit : ce ne sont des preuves que dans un cadre particulier, donc pas valables dans les autres cadres, donc il faut interpréter selon le patient. De l'autre (la SS) on exige leur application sous peine de réprimande. La notion de placebo pourrait servir d'instrument de mesure à la distance restant à parcourir pour qu'une proposition devienne une preuve dans le cadre d'un système. De toute façon, dans les systèmes complexes, les preuves n'existent pas. C'est un abus de pouvoir de la SS, ou une incompétence du milieu médical de les imposer de façon impérative. Au bénéfice de l'industrie pharmaceutique. On tourne en rond ». ( suite et fin du texte de Y.A.L.)

Os court : « Avant de se foutre par la fenêtre, il faut penser à l'ouvrir. » Sim

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LEM 158 du 20 juillet 2000

 

Tiens, tiens , vous avez dit " plagiat " ?

Dr Philippe Deharvengt

« Bien avant la parution du livre à succès du Dr.Véronique VASSEUR "Médecin-Chef à la Prison de la Santé", j'avais dénoncé (*) les graves dysfonctionnements de l'institution carcérale française . Dès le mois d'août 1999 , j'avais adressé un courrier à ma Direction Régionale des Services Pénitentiaires , pour l'informer des "difficultés croissantes rencontrées par les personnels médicaux et para-médicaux dans l'exercice de leur mission de soins et de prévention" . Riche d'une expérience de quinze années d'exercice en milieu carcéral , je dénonçais alors "la démission progressive des personnels pénitentiaires de leurs tâches disciplinaires" . Cette lettre , qui , pour moi , constituait tout à la fois un cri d'alarme et un appel au secours , était restée sans réponse. C'est pourquoi, devant l'énorme succès médiatique du livre du Dr.Véronique VASSEUR , j'ai récidivé en lui adressant une "Lettre ouverte" , publiée dans le Quotidien du Médecin du 02/02/2000 ( les Internautes peuvent consulter la page http://www.quotimed.com , aller à "articles" , puis taper DEHARVENGT dans la fenêtre correspondante ) .

(*) Dans la LEM 128 du 25 novembre 1999, notre ami Philippe Deharvengt signa un éditorial au titre éloquent : " Je quitte le navire pénitentiaire " . Ndlr

Retrouver la confiance

Voici les thèmes exposés, fondés sur mon observation directe . La surpopulation carcérale , et l'intolérable promiscuité qu'elle engendre . La vétusté des locaux , l'hygiène très insuffisante. La pénurie de personnels de surveillance et d'encadrement. La totale impuissance ( et l'absence de volonté ) de ces personnels face à l'irrésistible dérive de la population pénale , de plus en plus majoritairement composée de minables petits voyous analphabètes , crétinisés , souvent fanatisés , xénophobes , inaccessibles à tout projet d'insertion sociale , ne connaissant qu'une loi : celle du plus fort , du "caïdat" , de la violence et du racket . L'augmentation constante de la prévalence des psychotiques , qui , selon le rapport PRADIER , lorsqu'elle dépasse 10% ( ce qui est le cas ) , "la vie devient impossible pour les autres détenus , les agents de l'administration pénitentiaire et le personnel soignant" . Et cela par manque de structures médico-psychiatriques adaptées. L'effet criminogène de la détention : on entre en prison délinquant , on en ressort assassin potentiel. Le triste record détenu par la France au sein de la Communauté Européenne du nombre et de la durée des détentions dites "préventives" ( c'est-à-dire en attente de jugement ) .

 

Restaurer la conscience

Et je concluais ainsi : "d'après les textes et les discours officiels , la prison est censée avoir pour vocation la privation provisoire de liberté , ainsi que l'éducation et la réinsertion . Force est de constater que , de ces trois missions , seule la première est assurée . Les détenus sont censés sortir meilleurs de leur séjour en prison ; ils en sortent bien pires . Qui aurait aujourd'hui l'audace , la stupidité ou l'inconscience de nier l'effet criminogène de la vie carcérale ?" .

 

Renforcer la compétence

Et voilà qu'en ce beau 14 juillet , le Président de la République répondant , lors de la traditionnelle garden party de l'Elysée aux questions de quelques journalistes de renom , et reprenant à son compte les propos de Madame le Garde des Sceaux qui avait elle-même repris les conclusions de la Commission d'Enquête Parlementaire sur la situation dans les prisons françaises , ne dit rien d'autre que tout cela . Il se trouve que , quand j'ai appris qu'un Député de mon Département avait été nommé par le Pdt. de l'Assemblée Nationale Secrétaire de cette Commission d'Enquête , je lui avais fait parvenir un exemplaire de mon article » Fin du propos de P. Deharvengt .

 

Os court : « Quand on a la santé, c'est pas grave d'être malade. » Francis Blanche

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LEM 159 du 27 juillet 2000

Le problème cerveau-esprit

Yvan.O. GODFROID ( MD )

« Le « problème cerveau-esprit » désigne la recherche des relations qui existent entre le cerveau et l'esprit, ou, en d'autres termes, entre l'aspect objectif (observation à la troisième personne) et l'aspect subjectif (tel le phénomène de conscience). Il s'agit véritablement d'un « problème », car jusqu'à présent la psyché et le soma ont été étudiés de manière restrictive. C'est à ce niveau que se situe le travail intitulé : « La psychiagénie. Résultats préliminaires d'une ré-analyse du problème cerveau-esprit ». Il s'agit du premier article consacré entièrement à ce nouveau paradigme. Le projet psychiagénie est un modèle théorique original des relations psyché-soma en cours de développement au Psychiagenia & Psychiatry Research Group (PPRG). Il se base à la fois sur les avancées les plus récentes des neurosciences, et sur l'approche clinique propre à la pratique médicale. A ce titre, l'effet placebo est un merveilleux champ d'expérimentation de ces interactions entre le cerveau et la pensée, encore si peu investiguées. On pourrait également citer le pseudocyesis (ou grossesse nerveuse), ou encore le phénomène de « craving » (appétence décrite par les toxicomanes en sevrage). Le projet psychiagénie n'en est qu'à ses balbutiements, et les résultats préliminaires évoqués plus haut seront modifiés, pour y inclure les données issues d'autres domaines (philosophie, intelligence artificielle, physique, etc.).

 

Élève de Pythagore, c'est vraisemblablement le philosophe grec Alcméon (500 av. J.-C.) qui le premier reconnaît le rôle du cerveau dans la pensée (6). Il sera suivi dans cette voie par Hippocrate et Hérophile. Ce dernier attribue aux ventricules cérébraux, qu'il a découvert par la dissection, la genèse de la pensée. Cette croyance se maintiendra au moyen âge, avec Albert le Grand et le médecin arabe Avicenne, qui tous deux localisent les fonctions cognitives au sein des ventricules. La renaissance n'apportera pas de bouleversement dans ce domaine, mais l'exploration de la vie mentale est de plus en plus la préoccupation des philosophes (Montaigne, Bacon, Vives, Pomponazzi). Descartes voit en la glande pinéale (épiphyse) le substrat anatomique des relations entre l'âme et le corps (3). C'est dans cette structure unique et médiane que le soma, simple machinerie, reçoit les ordres de la psyché, qui dirige. Il rattache par ailleurs aux circonvolutions cérébrales la trace matérielle des phénomènes mnésiques. Un demi-siècle plus tard, Cabanis (2) modifie cette approche et reconnaît clairement que le cerveau est « l'organe qui secrète la pensée », abandonnant l'hypothèse dualiste. La Mettrie, puis Diderot (4), abondent en ce sens et considèrent que la pensée est une fonction naturelle du cerveau. A la même époque, Hoffmann tente de modéliser cette approche, avec une démonstration impliquant la formation d'un fluide nerveux cérébral, qui dirige le corps entier via les nerfs. Avec le début du XIXe siècle, la doctrine des localisations cérébrales domine la pensée médicale, mais c'est dans la seconde moitié de ce siècle qu'elle fera des avancées prodigieuses (Wernicke, Broca, Dax) (6). Esquirol et ses élèves seront d'ailleurs avant tout des somatistes. Pour Feuschterleben, « toute psychose est une névrose » : c'est-à-dire que toute affection psychiatrique est liée à un désordre organique (« nerveux », donc cérébral). A partir de cette époque, la médecine va connaître la formidable avancée qui se retrouve dans toutes les sciences. La physiologie du corps humain, y compris la chimie du cerveau, avec la découverte des neurotransmetteurs, sera de mieux en mieux appréhendée. Toutefois, l'essence même de l'être humain - la relation psyché-soma - reste une parfaite inconnue. On semble avoir sauté une étape, d'une part à cause de sa réelle difficulté, mais aussi sans doute parce qu'aux yeux des organistes les plus acharnés, la recherche de l'esprit « manquait de sérieux ». Aussi, et même s'il faut saluer quelques tentatives remarquables (1), la science moderne reste-t-elle imprégnée du lourd héritage cartésien : d'un côté les "somatistes", de l'autre les "psychistes" - et le qualificatif de confraternelles n'est pas le meilleur que l'on puisse attribuer à leurs relations.

C'est dans ce contexte, et à l'heure où il semble que le vent tourne (7), que s'inscrit le projet psychiagénie. Il s'agit d'un outil théorique (perfectible, certes, comme tous les outils) conçu pour l'étude de la relation entre cerveau et esprit. Et comme en médecine la pathologie est toujours le meilleur chemin pour appréhender la physiologie, la psychiatrie est dans ce domaine aux premières loges. Tout le chemin qu'il reste à parcourir consistera donc à concilier le subjectif et l'objectif au sein d'une théorie commune. Le voyage ne fait que commencerŠ ».

Fin du texte. Les références bibliographiques sont sur le Site Exmed à http://www.exmed.org/exmed/reflexion1*.html#psyc . (ndlr)

 

Os court « Le devoir c'est le devoir, et vice versa. » F. Blanche

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LEM 160 du 4 août 2000

A vous de nous dire

Dr François-Marie Michaut

Nos deux dernières Lettres ont été chacune l'oeuvre d'un seul rédacteur. Dans la Lem 158, Philippe Deharvengt a expliqué sa vision très sombre de la réalité de la médecine pénitentiaire en France qu'il a vue de l'intérieur pendant 15 ans. Dans la 159, Ivan Godfroid a développé son thème de recherche sur les relations entre le cerveau et l'esprit, et le programme indépendant qu'il mène à ce sujet depuis 5 ans. Ici encore, c'est le récit d'une expérience vécue, et non la reprise de travaux ou d'observations effectués par d'autres auteurs qui est proposé aux lecteurs. La plupart des publications scientifiques actuelles ne sont que des études sur des études précédentes déjà publiées. Cela coûte infiniment moins cher aux organismes financeurs, et selon le principe " publish or perish " assure la survie des équipes de recherche. Ici, nous n'avons pas de prétentions scientifiques, ce qui nous permet en passant de demeurer tranquillement francophones. Si des confrères et amis médecins comme non-médecins se donnent la peine de nous fournir gracieusement des textes à publier, la moindre des choses n'est-elle pas de répondre à leurs propos ? Tous ceux qui publient, ici comme ailleurs, prennent le risque de s'exposer. Leur travail peut-il être considéré comme un bien de consommation comme un autre, qu'on peut jeter sans état d'âme après l'avoir utilisé ? C'est l'éthique d'une entreprise comme Exmed qui est en cause.

Retrouver la confiance

Le délai français légal d'interruption volontaire de grossesse doit, à la demande du ministre des Affaires Sociales, passer de 10 à 12 semaines . L'autorisation parentale pour les mineures ne sera plus indispensable, sous le couvert d'un " adulte référent ". Les techniques opératoires nécessiteront donc d'avantage d'anesthésies générales et d'actes chirurgicaux. Que se passera-t-il pour les praticiens et pour l'adulte référent en cas d'accident opératoire lorsque les parents n'auront pas été mis au courant de la situation de leur fille mineure ? Comment les équipes qui assurent cette activité vont-elles réagir à ce risque professionnel accru ? Ont-elles été seulement entendues avant une telle prise de position politique ?

 

Restaurer la conscience

Le Dr Jacques Blais, l'un des pionniers d'Exmed, vient de cesser son activité de médecin généraliste après 30 ans d'exercice en banlieu parisienne. En guise d'examen de conscience, il nous en explique les raisons, sans fioritures ni complaisance, dans un document qui sera prochainement publié ici.

 

Renforcer la compétence

Cette fois-ci l'Ordre des médecins semble s'orienter vers une prise de position sur l'Internet médical . En France, la consultation médicale par téléphone ne peut donner lieu à une rémunération du praticien. La multiplication des sites médicaux, et l'invention constante de nouveaux usages de ce vecteur de communication en matière de santé, pose un problème très concret. Donner des conseils médicaux ( cela ne peut être des consultations ) est une entreprise difficile, et probablement utile dans un certain nombre de circonstance. Le Dr Chassort, son secrétaire général, admet , à titre personnel, que cette activité médicale d'un nouveau type doit pouvoir donner lieu dans l'avenir à une rémunération. Ici, et avec nos confrères de MMT-fr, nous soutenons l'idée que travailler dans l'Internet de santé est une réalité beaucoup plus large , plus dynamique et plus porteuse pour la santé que cette seule activité de "conseil". C'est une nouvelle spécialité médicale à part entière qui naît sous nos yeux, dont le devenir encore inconnaissable ne sera que ce qu'en feront ensemble ses acteurs internautes, et non les décideurs institutionnels, aussi respectables soient-ils.

 

Os court : « La médecine fait des bonds, mais les malades restent toujours dans le lit. » Jean-Marie Gourio

Autre numéro 
LEM 161 du 10 août 2000

Poubelles de la république

Dr Philippe Deharvengt (*)

Quelle différence existe-t-il entre nos poubelles et les prisons françaises ? Pour nos poubelles , on nous demande de pratiquer un "tri sélectif" en vue du recyclage des déchets . Dans le système carcéral français , point de tri sélectif et encore moins de recyclage . On y trouve de tout pêle-mêle : des assassins , des politiciens véreux , des braqueurs de banques , des préfets , des dealers , d'anciens ministres corrompus , des pédophiles , des policiers ripoux , des enseignants , etc... Et notre société semble totalement indifférente à ce lent pourrissement . Rien ne doit transparaître à l'extérieur ; alors , pour que l'odeur ne soit pas trop irrespirable , l'Administration Pénitentiaire s'assoit sur le couvercle . Et voilà que le Docteur Véronique VASSEUR a l'audace de soulever ce couvercle ! Scandale ! Crime de lèse-République ! Voilà que les députés , les sénateurs , la Garde des Sceaux et jusqu'au Président de la République découvrent qu'il y a des prisons dans ce pays , et que ce qui s'y passe est vraiment nauséabond . Vertueuse mais bien tardive découverte. En vertu de la trop fameuse "présomption d'innocence" , les prévenus devraient au moins bénéficier de conditions de détention humainement acceptables ; c'est loin d'être le cas . Quant aux condamnés , ils seront un jour libérés ; il s'agit qu'ils sortent de prison amendés et repentis . Ils en sortent encore plus asociaux et haineux .

(*) ancien médecin-chef des poubelles de la République.

Retrouver la confiance

Encore une fois, cette question de la situation humaine et sanitaire dans les prisons françaises est soulevée dans la LEM par le Dr Deharvengt. Ce fut déjà le cas dans le numéro 158. Cette insistance, à la demande de la rédaction, a une autre raison que notre éditorialiste est trop pudique pour évoquer lui-même. Notre confrère, à l'arrêt de ses fonctions médicales dans les prisons, a voulu continuer de pouvoir apporter son aide humaine. Il a donc demandé à devenir modestement visiteur des prisons. Dans notre pays, au noble passé de défenseur des libertés, une telle fonction bénévole est soumise à la décision souveraine de l'administration pénitentiaire. Nos lecteurs doivent savoir que cette autorisation n'a pas été accordée à Philippe Deharvengt.

Restaurer la conscience

Toute semble se passer comme si ses prises de position publiques sur des réalités heurtant sa conscience de médecin et de citoyen constituaient une faute impardonnable aux yeux des responsables administratifs. Restaurer la conscience de ce qui se passe vraiment dans nos prisons constituerait-il un délit d'opinion, rangeant notre pacifique ami parmi les dangereux agitateurs ? C'est hélas ce type d'interprétation que risque de provoquer dans l'opinion publique un semblable refus. L'homéostasie de toute institution est un formidable frein à toute possibilité de changement.

Renforcer la compétence

Toute l'actualité de l'été n'est pas aussi sombre à Exmed. La Toile a aussi ses petits miracles tout simples qui vous font chaud au coeur. Un courriel du Dr Jean-Paul Kornobis, généraliste à Lille, démontre une fois de plus les ressources de l'Internet. Ce confrère est passionné de René Girard, spécialiste de littérature, dont les travaux anthropologiques lui paraissent de nature à pouvoir être utilisées dans le domaine des relations médecins-malades. Il se trouve qu'une telle démarche n'est pas du tout étrangère à la rédaction, comme en témoignent les pages indiquées par le moteur de recherche d'exmed à la demande : rené girard. Les contacts qui vont s'établir sur ce sujet très précis seront de nature à permettre d'améliorer nos échanges, nos recherches et, par voie logique de conséquence, notre compétence médicale. Sans oublier, naturellement, de tempérer tout cela d'une salutaire pincée d'humour.

 

Os court : « Un maître à penser ? Même pas un centimètre . » Jean-Marie Gourio ( Brèves de comptoir )

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LEM 162 du 24 août 2000

Si j'étais député français

Dr François-Marie Michaut

Oui, vraiment, de droite comme de gauche, je serais furieux si j'étais un membre de l'assemblée nationale. Que l'on profite de mes vacances, et de celles de mes électeurs, pour annoncer avec le plus de discrétion possible dans la presse un fait aussi dérangeant me laisserait un goût bien amer. Ce n'est quand même pas rien que la marge d'augmentation des dépenses de santé votée par mon auguste chambre soit ainsi pulvérisée au cours du premier semestre 2000. Que se passe-t-il donc pour qu'on assiste au doublement des prévisions ? Je ne peux que me poser des questions. Où cela accroche-t-il ? Aurais-je été trompé par les armées de "spécialistes" administratifs et leurs "experts" dûment certifiés ? Le système de modération des dépenses dont ils ont assuré la construction technique est-il complètement hors de toute réalité sur le terrain ? Pourquoi est-il inapplicable, ou, pour le moins inappliqué ? La seule solution intellectuelle qui me resterait alors serait celle d'un gigantesque complot des professions médicales qui se livrerait à une débauche de dépenses superflues pour soigner leurs patients. Décidemment, il y a bien des choses que je ne comprends pas dans cette affaire là. Enfin, Dieu merci, je ne suis pas député, mais, bien modestement, médecin, et ... pas du tout comploteur aux motivations inavouables.

Retrouver la confiance

« Selon un article publié dans le "AMA News" du 14 août, écrit par Scott Gottlieb, M.D., l'appel à faire quelque-chose contre les prix exagérés des produits pharmaceutiques joue bien sur "Main Street", mais tombe à plat sur "Wall Street" aux USA. Le Dr. Gottlieb est un médecin-résident de la 1ère année en médecine interne à l'Hôpital de Mount Sinai à New York. Il est aussi un ancien analyste financier pour la compagnie de Wall Street, Alex. Brown et Fils.

Restaurer la conscience

Ce que Wall Street comprend bien, et que Main Street ne saisit pas, c'est que le prix des produits reflète la façon dont les compagnies pharmaceutiques recouvrent les frais de leurs recherches, et financent leurs efforts d'innovation pour l'avenir. Le congrès américain semble écouter tous ceux qui sont convaincus que les compagnies ont déjà gagné trop d'argent aux dépens des consommateurs. Un projet de loi qui vient d'être approuvé par la chambre des représentants et par le sénat donne le droit aux grossistes d'importer les produits génériques, et pourrait ainsi diminuer les prix. Les frais de recherche et développement d'un produit moyen peuvent atteindre environ 500 billions de $, et encore plus pour les produits compliqués. L' Amex Drug Index, qui représente les plus petites compagnies, dont l'existence repose sur la foi des capitalistes dans les recherches de médicament, est tombé 9% en juillet.

Renforcer la compétence

Frapper ainsi sur l'industrie pharmaceutique pourrait être dangereux pour notre santé dans l'avenir. Sans la stimulation des profits dérivés de l'innovation, nous pourrions être privés d'une nouvelle génération de traitements. Le Dr. Gottlieb écrit que les perdants ne seront pas nos concitoyens âgés actuels, mais les "baby boomers" et la "génération X". Ils ne pourront pas profiter de nouveaux produits basés sur les recherches génétiques. D'ici à dix ans , il n'y aura pas de réponse à l'accusation selon lesquelles les compagnies pharmaceutiques ont gagné trop d'argent. La question sera alors : combien d'innovation a été demandée par notre société ». Dr Harold Burnham, notre correspondant aux USA. L'obsession de la nécessité de la réduction des dépenses de santé est bien une idée sans frontière, et non une spécificité franco-française. C'est bien notre mode de pensée économique qui doit être ré-examiné, et non ses applications locales à l'époque de la globalisation mondiale. (ndlr)

 

Os court : « Si le travail c'est la santé, à quoi sert la médecine du travail ? » Anonyme, transmis par Marianne Padé .

 

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LEM 163 du 30 août 2000

Une série exceptionnelle

L'objectif de la LEM est de rendre publics des écrits sur les réalités de la médecine et de la santé pour alimenter des échanges de qualité entre les utilisateurs et les professionnels de la santé. Notre ami Jacques Blais, que chacun connait ici, vient de raccrocher son stéthoscope après trente ans d'exercice en banlieue parisienne. Etant donné son intérêt majeur, le texte que nous allons publier en morceaux dans la LEM est déjà consultable dans sa totalité sur le site à http://www.exmed.org/exmed/reflexion2.html . Bonne lecture, et n'hésitez pas à ouvrir le dialogue si vous le souhaitez. Ecoutons-le.

Dr François-Marie Michaut

 

Retrouver la confiance

«Au mot de bilan je préférerai l'expression de regard lucide, et ce qu'il existe de plus intéressant après trente ans est de saisir l'occasion d'un raccourci, d'établir un résumé, pour ne garder que la trame de l'essentiel. A quelle notion réduire, comme on le dirait d'un plat longuement mijoté que la cuisson ramène à moins de volume, son parcours professionnel ? Pourquoi avais-je choisi ce métier ? Pour aimer les gens, et bien entendu pour en être de ce seul fait aimé en retour. Jamais pour la science, ou pour le pouvoir, tout en acquérant avec l'expérience la notion qu'il existe totalement, en toute lucidité, avantage parfois, risque souvent, en tout cas état de fait, qui nécessite d'en être perpétuellement conscient.

Restaurer la conscience

Tiens donc, déjà deux des éléments fondateurs d'EXMED, et la confiance est apportée par l'idée qu'il y avait d'emblée autant ou plus de pour qui que de pourquoi dans cette orientation d'une vie. Le mot carrière n'a d'intérêt que dans l'image de celle que l'on creuse à mesure des années pour en extraire sable, minerai, en un labeur renouvelé. Trente ans plus tard, quel serait le résumé, la trame résiduelle ? Ai-je sauvé la terre ? Que nenni, et même dans mes activités de tiers-monde en détresse, Liban ou Centrafrique de Bokassa. Lucidité : je ME suis fait autant plaisir dans ces activités fabuleuses que j'ai apporté d'aide éventuelle. Et cet adjectif fabuleux contient fable, conte, émerveillement. Le tiers-monde médical est un prodigieux apprentissage de l'humilité. Quand le "pro" n'est pas ou plus à son poste, le local, l'autochtone illettré, réputé ou estimé primaire, saura effectuer l'élémentaire, la sauvegarde, la gestuelle. La grande frustration de l'intellectuel, du "savant" diplômé, à travailler sur place, est d'avoir été incapable de transmettre une théorie, un savoir construit, un savoir-être, un sens de la conception des êtres, quasiment une lecture de l'âme. Le "vrai" médecin blanc (ou non d'ailleurs) éduqué n'aura pu montrer qu'une gestuelle répétitive, et s'il a sauvé des vies, certes, il n'aura guère amélioré le sort des êtres, comme il s'efforce de le faire à longueur de vie sur ses terres.

Renforcer la compétence

En trois décennies, je n'aurai cherché qu'à exister pleinement grâce à ce métier extraordinaire. A tous les professionnels de tous les corps de métier qui vivent leur profession avec enthousiasme, et on en croise beaucoup dans certains médias par exemple, les journalistes médicaux télé, grand public, les grands communicateurs, le médecin aura encore envie de dire que lui, dans son service, aura pratiqué la seule activité qui capte, guide, perçoit, aide, conseille, mobilise, accueille, l'être humain dans sa totalité corporelle et spirituelle. En communiquant, en m'exprimant, en m'évadant, et en tentant d'un bout à l'autre d'expliquer, de convaincre, en accueillant, en observant, en écoutant, en consacrant mon énergie de persuasion, de confiance, de conscience et de compétence à dire et redire à ces personnes venues à ma rencontre qu'elles avaient le droit d'être heureuses, j'ai prodigieusement existé dans ce métier » . Dr J. Blais , médecin généraliste ( à suivre dans les prochains numéros)

 

Os court : « Le devoir c'est le devoir et vice-versa » Francis Blanche

 


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