Archives de la LEM

LEM 164 du 5 septembre 2000

La personne médecine

Dr Jacques Blais

Un choix pour les êtres. Et lucidement l'évidence d'un choix pour moi. Quel plus grand élan que cette impression d'exister, le sentiment d'aider souvent, d'être utile parfois, efficace à l'occasion, d'accueillir, d'offrir, d'attendre, de recevoir, d'écouter, de bénéficier. Un choix pour être. S'il devait se trouver une anecdote, un cas, pour illustrer, ce serait assurément un "cas" non médical au sens clinique, mais tellement médical au sens étymologique ; Medeo : je réfléchis en avançant, ou bien je prends soin de. Une patiente d'une trentaine d'années perd brutalement son mari, le père de ses deux enfants. Impossible pour le médecin de "faire" quoi que ce soit pour elle. Et pourtant tout, au contraire. Anéanti par son impuissance le médecin, au sortir de chez la jeune veuve envahie de chagrin et de personnes parasites, lui écrit une longue lettre dans sa voiture, lui parlant de son mari qu'il appréciait beaucoup, de son image, de l'avenir, des enfants, de son époux en tant que vivant définitif. La jeune femme évolue, cicatrice, survit ? Et un jour, deux ans après, elle ose évoquer pour le médecin sa lettre. Elle la sort en consultation de son sac et elle lui dit "Vous voyez, je l'ai toujours avec moi, et quand cela va trop mal je la lis". Médecin-médicament, praticien de la relation, de l'être entier, de la vie et de la mort. La personne médecine.

Retrouver la confiance

Trente ans pour partager, dire, communiquer, à travers l'écrit des articles, livres, éditoriaux, pour tenter là aussi de convaincre, de réfléchir, de progresser en provoquant des échanges. A travers l'oral de la formation FMC, de l'enseignement en troisième cycle de faculté. Ce besoin d'exprimer la vie dans les lignes et les pages, la presse, les images, ce bonheur de s'évader dans d'incroyables voyages, c'est l'illustration de cette systémique du monde de la médecine. Une interactivité permanente entre les professionnels, qui mènera toujours les membres du système exécutant à avoir une influence sur les décideurs, les apprenants à modifier les enseignants, les patients à bousculer les soignants, les industriels à changer les utilisateurs, les prescripteurs à évoluer en fonction des prestataires, les associations à générer la recherche, les gouvernants à réagir, les syndicats à choisir, ou à subir, ou à rugir, ou à rougir, ou à mugir, des nouveaux intervenants à surgir, etc...

Restaurer la conscience

Et en sachant que, comme dans tout système (du grec sustema qui signifie simplement ensemble), modifier A fera réagir B, provoquera la coalition de B, V, et K, et l'opposition de R, S, et F, et qu'à travers ces courants, ces liens, ces transmissions, ces transactions, oppositions, coalitions, additions, dépendances et réactions la vie de la santé se bâtira une structure.

Renforcer la compétence

Que la thérapie et l'étude du système consistent depuis la nuit des temps à proposer, modifier, provoquer, des changements dans les interactions, les rôles, les influences, sachant que tout thérapeute SAIT qu'il ne pourra ni ne devra agir sur les individualités, même pathologiques. Si les médecins sont pathologiques, les gouvernements les malades désignés, les syndicats vécus comme tièdes, les patients comme exigeants, l'industrie comme coûteuse et poussant à la consommation, les médias comme effrayantes, la thérapie systémique de la santé ne peut proposer que des trajets, des stratégies de communication, des modifications des relais, des constitutions différentes des influences et des associations. Pas des mises en thérapie individuelle, comme on procéderait à des mises en examens. Fussent-ils complémentaires... ( à suivre dans les prochains numéros ).

 

Os court : « Le calembour, c'est la chaise-longue des méninges » San-Antonio
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LEM 165 du 11 septembre 2000

Lucidité systémique

Dr Jacques Blais

« Une dernière lucidité systémique s'impose alors, au moment de décider de prendre sa pré-retraite. Pourquoi aujourd'hui ? Allons bien au-delà de l'évidence.L'"evidence based/medicine" de ce sujet parlera de l'âge, des 70 heures hebdomadaires de travail au cabinet depuis 30 ans, du supplément encore de 15 heures de formation, d'enseignement, de gestion, surtout lorsqu'on en est responsable, donc réunions, préparations, séances, etc... Mais l'intuition du choix savait tout cela. Pourquoi partir, sinon pour des raisons de système ? Pour certains l'évolution de l'assurance maladie, l'influence des gouvernements successifs, l'attitude bienveillante envers des dépenses incroyables en publicité, médiatisation, acceptant les dépenses favorables au CAC 40, électronique, films photo, fibres optiques, informatique, industrie, charlatanisme, etc... que génèrent les campagnes, les émissions, les alertes, la médiatisation outrancière, véhiculant la menace de mort perpétuelle, assortie de la recette miracle à base d'explorations, examens, drogues, thérapies, traitements, imagerie.Toujours le système de santé : indulgence absolue envers ce qui fait grimper le CAC 40, grâce à la peur véhiculée à outrance. Violence extrême envers les dépensiers à la petite semaine, les combattants de l'ombre qui tentent désespérément, les pieds dans la boue et les yeux sans soleil, de SOIGNER des personnes réelles, au jour le jour.

Retrouver la confiance

Cette option étant valable pour les quatre secteurs qui dépensent (y compris sans compter leur énergie et leurs convictions), la santé, l'éducation, la justice et la sécurité, rigoureusement non rentables pour la Bourse, donc sacrifiables à merci. On peut aussi partir pour un grand mot, qui génère de grands maux : l'éthique. En n'acceptant définitivement plus de se voir devenu complice d'un exercice soigneusement organisé pour être sans contrôle. La CMU ( couverture maladie universelle) était une NÉCESSITÉ absolue pour apporter les soins aux 10% de démunis répertoriés. Mais il était rigoureusement non moins indispensable de fixer les règles systémiques au jeu. Dire aux personnes concernées : "Nous vous aidons à vivre, à vous soigner, à devenir des êtres dignes, c'est là notre fierté, notre devoir, notre éthique". Et non leur laisser entendre un message qui dit "C'est gratuit, faites ce que vous voulez désormais, de toute manière nous nous garderons bien de contrôler quoi que ce soit, et nous ne donnerons aucun ordre dans ce sens". Élections obligent.

Restaurer la conscience

Que découvre le praticien de l'ombre et de la boue ? Des êtres en détresse bénéficiant enfin de soins normaux et souhaitables. Beaucoup. Et puis peu à peu des nuées de personnes percevant le message, en réalité l'absence de message, de travers. C'est gratuit donc je consulte où je veux quand je veux, autant que je veux. Il ne m'arrivera rien et les faits confirment. Et de plus futés encore, qui utilisent les droits qui ne sont pas les leurs, en empruntant les documents CMU du beau-frère, de la voisine de palier, du copain.

 

Renforcer la compétence

Débrouillardise ou audace, système D ou imagination, cette pratique est très courante. De même que celle de rester à vie un ayant-droit abusif. Ayant retrouvé du travail, quitté le foyer familial, voire même PACSé par exemple, pourquoi ne pas demeurer ayant-droit gratuit à vie de sa mère, puisqu'aucun contrôle de la CPAM ( caisse primaire d'assurance maladie) ou d'autres services ne vous demandera jamais de rectifier une situation nettement frauduleuse ? Enfin de plus malins encore, ou pervers, ont inventé un nouveau métier, consistant à faire le tour des cabinets médicaux, cinq, six praticiens différents, chaque semaine ou plus fréquemment encore, une petite pathologie peinarde invérifiable, mal à la tête, aux muscles du dos, rhume menaçant, migraine, fatigue, et de se constituer des caisses de médicaments basiques pour les écouler là où l'on en manque, au Kosovo ou au Maghreb » JB. Fin de ce texte dans la LEM 166 ( ndlr)

 

Os court : « Je donnerais cher pour être riche » José Arthur

 
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LEM 166 du 21 septembre 2000

Qui sera le superviseur ?

Dr Jacques Blais ( suite des Lem 164 et 165 )

« Le constat de carence de cette systémique est qu'aucun contrôle n'est effectué jusqu'alors, qu'un multiconsultant ne sera jamais inquiété. Le médecin oui, en sus d'être révolté, outré, scandalisé, écoeuré au point ... d'opter pour le MICA de la pré-retraite. Aux dernières nouvelles (QDM du 28 juin 2000) la donne irait vers un changement. Sans les sanctionner encore (le médecin oui, le patient non) on irait vers un contrôle, un signalement des surconsommateurs. Dernier aperçu systémique, la pré-retraite des médecins. Au départ il y a quatre ans, une conception : les vieux coûtent cher, évacuons-les, place aux jeunes dynamiques qui trouveront ainsi du boulot. Bilan à trois ans, le bide complet, aucune économie, les jeunes prescrivent beaucoup plus de technologie. Changement d'attitude, supprimons le MICA (modalités d'incitations à la cessation d'activité). Bagarre de la part des praticiens d'âge concernés. Gain de cause au rabais, mais ils partent encore. Dernière mouture, fin 99, bruit de suppression demandé par le FORMMEL (organisme de gestion où siègent la Sécu et certains syndicats). Absence de prise de position de Martine Aubry. Naissance de MICA 2000, association de défense de ces malfaiteurs que sont les 171 adhérents visant la pré-retraite décente après 30 ans d'activité très cotisante.

Retrouver la confiance

En profitant des inimitiés pour ne pas dire de la haine CPAM-Ministre, et Députés-Sénat, notre association (application de la systémique) parvient à gagner 9 mois de sursis, permettant à la génération des 57 ans jusqu'en septembre de partir presque dignement. A l'heure actuelle, que signifie l'étude systémique ? Les vieux praticiens sont entité et quantité négligeable et méprisable. Et le Ministère a profité d'un recours en Conseil d'Etat de 99 débouté concernant le montant de l'allocation de pré-retraite (ADR), au prétexte que cette allocation avait déjà été modifiée sans protestation des praticiens concernés il y a quelques années, cet épisode ne constituant donc pas un précédent, pour choisir la lâcheté, qui en serait surpris? Désormais les candidats à la pré-retraite partiraient avec 8 800Frs brut par mois, autrement dit avec un petit SMIC après leur trente et quelques années de médecine à 70 heures hebdomadaires, et à cotisation mensuelle équivalente à ce montant et même supérieures.

Restaurer la conscience

La systémique est en marche : coalitions, démolitions, démissions, démobilisations, détermination, démystification. Comme dans n'importe quel groupe, entreprise, famille, association, ethnie, société, les "malades" sont désignés, ceux qu'il faut soigner, éloigner, annihiler, traiter, les fautifs sont montrés du doigt, les coalitions se font jour, le jeu des pouvoirs. Il y a généralement un thérapeute en action, il ou elle aura du travail après le départ de Martine Aubry, et toujours un superviseur derrière la glace sans tain en thérapie systémique, pour repérer les erreurs, le non vu, le non dit, les alliances, et redresser les stratégies proposées. Le Président, le Premier Ministre, le successeur de ce chef syndicaliste récemment humilié, l'opinion publique, l'Europe, le CAC 40, à qui le très délicat rôle de superviseur dans ces séances à venir ? ». Fin du texte de Jacques Blais

 

Renforcer la compétence

Exmed va prendre quelques jours de repos. Ils sont bien nécessaires pour prendre le temps de réfléchir à l'évolution de la nouvelle spécialité médicale que constitue cet Internet de santé auquel nous travaillons avec vous tous. Comment en faire encore plus un outil utile à chaque personne, et non un moyen de promotion supplémentaire de contraintes collectives amoindrissantes. Rendez-vous le 19 octobre, si vous voulez bien continuer la route avec nous. FMM

 

Os court : « En voilà des sales types, les gens » A. Allais

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LEM 167 du 19 octobre 2000

Arnaque-santé.com

Dr François-Marie Michaut

Le coiffeur branché d'un collaborateur d'Exmed a reçu une alléchante proposition. Un confrère propose à 2 ou 4 investisseurs de participer au capital d'une "start-up" à hauteur de 4 à 6 millions de FF. " Le Site ... .com offre une information large et compréhensible pour le grand public sur la santé et la médecine, des services spécifiques aux professionnels, et un support attractif et interactif pour les annonceurs " y lit-on. " Cette levée de fonds permettra de poursuivre le développement du site ... et d'en faire un portail leader dans l'information, les conseils et les services au grand public et aux professionnels de santé" est-il précisé. Quand on apprend qu'un des "plus" annoncés est "le marketing viral" on se pose quelques questions. Quand on constate que des sites comme Exmed, ou ses amis, qui existent depuis trois ans, ne figurent pas dans leur moteur de recherche, on dresse l'oreille. Quand on consulte le fichier de l'Ordre des médecins, il n'y a pas trace du prétendu confrère, qui se baptise également président du conseil d'administration. Le contenu des plus ténus du site vanté ne trompe aucun médecin. Le " grand public", hélas, risque fort de faire les frais de semblables initiatives, à l'évidence mercantilistes. L'Internet constitue une voie royale pour le charlatanisme de santé, dans la mesure où ceux qui savent ce qui en est de ce type de promesses de bénéfices laissent faire passivement.

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Le Ministère de la santé et l'ordre des médecins français semblent préoccupés de cette évolution de l'Internet de santé. Ils aimeraient bien " un certain nombre de critères permettant à l'usager de se faire lui-même une opinion sur la qualité du site qu'il visite ". C'est pour étudier cette question que nous sommes invités, au titre de l'association des Médecins Maîtres-Toile francophones, à participer à une réunion à Paris le 25 octobre.

 

Restaurer la conscience

Curieux spectacle depuis quelques jours à Périgueux. Chaque matin, des médecins de Dordogne et des professionnels de santé libéraux, tels des camionneurs ou des artisans en colère, bloquent avec leurs voitures l'un des principaux rond-points du centre ville entre 8 heures et 8 heures 30. La réaction de la population est mitigée, nous dit notre correspondant local. L'exaspération de gens qui parviennent de moins en moins à pouvoir faire tourner leurs cabinets personnels en travaillant près de deux fois plus longtemps que les salariés n'émeut guère. Rien à faire, l'image de nantis des médecins leur colle à la peau, et brouille toute autre réalité. Faudra-t-il qu'un jour les médecins, poussés à bout par le désespoir de ne plus pouvoir faire leur métier, en arrivent à dire qu'ils vont vraiment faire comprendre aux citoyens à quoi ils servent en cessant toute autre activité que celle de soigner leurs patients ? Y a-t-il encore des règles administratives incontournables pour des gens qui se sentent menacés de mort dans leur vie professionnelle, sans pouvoir rêver au moindre bouclier d'une convention collective, d'un statut ou simplement des dispositions du droit du travail ? Les forces de non changement de la profession médicale fondent à vue d'oeil , et les choses peuvent basculer brutalement.

 

Renforcer la compétence

Le Pr Mylène Botbol-Baum nous incite à ouvrir un débat bioéthique sur le Net. Son texte " Les fabuleux enjeux de la production d'antitélomérase " http://www.exmed.org/exmed/eth1.html mérite une lecture attentive, tant de la part des médecins que des profanes. Puis discutons ensemble sur la liste électronique exmed1. Pour s'abonner à la liste de discussion : un simple mail vide à join-exmed1@liste.gyneweb.fr suffit.

 

Os court : « Les enfants c'est comme les pets, on ne supporte que les siens. » Frédéric Dard

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LEM 168 du 26 octobre 2000

Nos amis hollandais

Dr François-Marie Michaut

Malgré l'abolition des barrières douanières, les échanges entre les pays de la vieille Europe restent limités. Exmed a ainsi appris par notre ami et collègue médecin maître-Toile francophone Marc Jamoulle, professeur de médecine générale en Belgique, que les généralistes hollandais se livrent à une importante recherche. Il s'agit tout simplement de réaliser une enregistrement en continu de l'activité des médecins généralistes, pour en connaître la teneur et les modalités. Comment, diront nos lecteurs profanes, on ne sait pas encore ce que font exactement les médecins de premier recours, qui ils soignent et de quelle façon ? C'est l'exacte vérité, et cet inventaire n'a pas vu le début d'un semblant de mise en oeuvre en France avant la décision autoritaire de tout le train de mesures contraignantes et restrictives mises en place il y quatre ans par un gouvernement de droite, puis poursuivies à l'identique par un gouvernement de gauche. Et nos députés vont ainsi voter les yeux fermés et la main sur le coeur quel doit être le taux annuel d'augmentation des dépenses de santé à imposer aux professions de santé. Aux Pays-Bas, le ministère finance entièrement depuis 4 ans le LINH, qui est un système de recueil de données en continu avec un réseau de 200 médecins dans 103 cabinets rémunérés pour cette tâche. Une grande enquête, avec notamment l'interwiew de 16 000 patients et la video de 20 consultations par médecin est coordonnée par le Dr Schellevis.

Retrouver la confiance

Les généralistes français ont accusé une baisse de leurs revenus professionnels de plus 4% d'après les associations qui supervisent leur comptabilité ( Quotidien du Médecin du 16 oct ). Le montant des honoraires perçus a progressé, dit-on, de 0,8%, mais la hausse des impots et taxes a été de 22,7%. Si chaque médecin réagit comme le chef d'entreprise qu'il est pour permettre à son cabinet de survivre, il n'a guère de marge de manoeuvre. Le montant des honoraires, tout comme celui des taxes et impots est fixé par le pouvoir politique ; et les frais de fonctionnement ne sont pas réductibles. La seule issue possible pour le médecin est de tenter une fois encore d'augmenter le nombre des actes. Ce qui devient extrêmement difficile dans le climat actuel de concurrence de la médecine et de contrôles tatillon des professionnels. Une fois de plus, les médecins vont être contraints, aux dépens de leur propre santé, d'augmenter encore des horaires de travail qui sont déjà le double de celui des travailleurs salariés. Pour être un nanti, il faut bosser dur.

 

Restaurer la conscience

L'un de nos confrères, dans un message électronique, nous raconte l'histoire suivante. Il s'est fait faire une prise de sang, en demandant un dosage de ses anticorps antitétaniques. Le laboratoire lui répond : " Taux d'anticorps satisfaisant. A controler à nouveau dans 7 ans ". Rien de bien extraordinaire, sauf que ce médecin nous affirme ne pas avoir été revacciné contre le tétanos depuis 25 ans. Sans vouloir conseiller une telle pratique à quiconque, on est bien obligé de se poser des questions sur la valeur pour chaque personne des renseignements d'ordre statistique généralement admis par la profession médicale et transmis souvent sans nuance au public.

 

Renforcer la compétence

Un médecin possédant une intelligence émotionnelle bien entrainée ( ce qui est possible toute la vie, contrairement au trop célèbre QI, fixé dès l'adolescence ) présenterait une efficacité dans son travail plus de cent fois supérieure à celle d'un médecin moyennement doué d'intelligence émotionnelle. Tel est le résultat de travaux rapportés par Daniel Goleman , ancien professeur de psychologie à Harvard. Voilà une notion du plus haut intérêt sur laquelle nous reviendrons ensemble. Renforcer la compétence des médecins, ne serait-ce pas avant tout renforcer leur compétence émotionnelle ?

 

Os court : « On peut être hermétique sans avoir rien à dire. » Sacha Guitry

 

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LEM 169 du 2 novembre 2000

Echos américains

Dr Harold Burnham ( MD)

Selon un sondage de l' AMA , le nombre de candidats en première année dans les 125 écoles de médecine aux USA diminue pour la troisième année de suite . Les 38 529 candidats sont encore en baisse de 6% sur l'année précédente en 1999. Moins 9,1% parmi les hommes. Les candidatures féminines baissent de 2%. Un nouveau sondage de "Harris Poll" montre que le public américain croit que les médecins et les scientifiques ont les métiers "les plus prestigieux", par rapport aux banquiers, hommes d'affaires, chefs de syndicats, et journalistes . Pour 61% des sondés, les médecins ont "le plus grand prestige", suivis par les scientifiques avec 56%. A comparer aux 15% qui ont qualifié les banquiers et les hommes d'affaires comme de "grand prestige".

L'État de New York adopte un plan anti-fraude, largement critiqué, mais politiquement très populaire pour son programme d'assistance médicale, "Medicaid" : l'empreinte digitale électronique développée pour empêcher les fraudes des adhérents . L'État dépense 10 millions de dollars dans un contrat avec la filiale d'une compagnie française, pour contrôler l'empreinte digitale des presque 450 000 adultes de Medicaid . On pourrait ainsi supprimer plus de 38 223 adultes de l'assistance publique depuis 1995, avec une économie de 297 millions de dollars . Sept autres États, qui avaient adopté le système, l'ont supprimé pour ne pas décourager ceux qui n'ont pas d' assurances médicales d'entrer dans Medicaid. Les HCFA (Health Cost Financial Administration (fédérale) sont en train de déterminer si exiger des empreintes digitales est bien légal.

 

Retrouver la confiance

- « Ce récit est parfaitement authentique. Il conte le difficile chemin entre l'apparition brutale de malaises inexpliqués chez une personne en parfaite santé, et l'annonce du diagnostic médical... Et tant que rien n'est prouvé la médecine a pour règle de dire que " tout est dans la tête ". De la supposition de manifestations psychosomatiques à l'hypothèse d'une pathologie psychiatrique, de l'indifférence à la torture morale, de l'absence de dialogue à l'agressivité verbale, des années peuvent ainsi s'écouler jusqu'à le reconnaissance d'une atteinte organique réelle.

Pour l'auteur, ce voyage a duré six ans personne n'est jamais préparé à une telle épreuve ... Car le malade est seul, désespérément seul. Alors il se bat, et forcément il se bat mal. Parce qu'il se trouve face à un engrenage médical bien huilé et à une déontologie ancestrale qui fait perdurer l'idée de " pouvoir médical " souverain, à une époque où, paradoxalement, on prône l'humanité dans la relation soignant-soigné . Le déroulement de ce " parcours du combattant " pourra paraître incroyable, ou inimaginable. Si on parle souvent de la médecine qui fait des miracles, on évoque difficilement celle qui maltraite psychologiquement les malades - appelés si justement " patients " - et qui fait que l'on s'interroge sur le " Avant tout ne pas nuire " du Serment d'Hippocrate » . Message envoyé à Exmed par Odette Val pour son ouvrage

"Hôpital...silence !" Site : http://www.planet4U.com

 

Restaurer la conscience

- La question intitulée " qualité des sites e-santé" par les autorités françaises de l'ordre des médecins et le ministère de la santé, telle, par exemple,qu'elle apparaît dans la LEM 167 dans" Arnaque santé.com" a été posée aux sites médicaux que nous sommes au cours de la réunion du 25 octobre 2000.

 

Renforcer la compétence

- La compétence pratique que peut nous donner notre exercice de médecins animateurs de l'Internet se trouve ainsi reconnue, et nous oblige à faire valoir le point de vue de ceux qui participent à nos communautés d'échanges virtuels. Faut-il toujours vouloir protéger les usagers comme s'ils étaient des enfants irresponsables, ou faire confiance à leur libre-arbitre ? Vos points de vue nous intéressent vivement pour pouvoir les transmettre.

 

Os court : « Réglementation sans sanction n'est qu'incitation à la transgression. » C.Q. Ritérou-Thiers   

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LEM 170 du 2 novembre 2000

Disqualification

Dr F-M. Michaut

Pour les enfants, un joueur est déclaré disqualifié quand il a eu un comportement trop ouvertement contraire aux règles fixées. Quand on fait partie de la toute petite minorité des professionnels qui s'intéresse au fonctionnement systémique des relations complexes entre les malades et leurs médecins , la même dénomination de disqualification revient souvent. Disqualifier un médecin est un jeu fréquent , et jamais gratuit. « le Dr X ? Il est nul. Il n'y a que l'argent ( ou le sexe) qui l'intéresse ». Quel praticien n'entend pas à longueur de temps de pareilles accusations ? Plus gravement, cette disqualification gagne peu à peu toutes les instances institutionnelles dans un pays aussi figé dans sa tradition que la France. La série incessante des affaires financières des hommes politiques traitées en justice entraîne pour le plus grand nombre une méfiance vis à vis de tous les pouvoirs établis. Dans un domaine comme celui de la santé, la constatation de " scandales" comme celui du sang contaminé, de l'encéphalite bovine spongiforme, de la vaccination contre l'hépatite B, des farines alimentaires animales, des organismes génétiquement modifiés, des alertes à la listériose, des pollutions marines récentes entraîne une défiance envers la compétence réelle de ceux qui devraient traiter ces problèmes pour la collectivité humaine. Plus discrètement, l'Université, les hôpitaux, l'Ordre des médecins et les syndicats souffrent de la même hémorragie chronique de confiance et se retrouvent exsangues. Quel dommage pour tous.

 

Retrouver la confiance

- Nous avons déjà parlé il y a longtemps ici des Organismes Génétiquement Modifiés. Faut-il croire Greenpace France qui affirme qu'une grande partie des laits maternisés destinés aux nourrissons contiennent de ces fameuses OGM ( citation du Dr Rémy Louvet sur le Net ) ? L'industrie pharmaceutique internationale peut-elle couvrir de semblables agissements ? Que pensent les parents de ce procédé ? Qu'en pensent les médecins ? http://www.greenpeace.fr/campagnes/ogm/liste.html

 

Restaurer la conscience

- Au pays de Molière, le système de sélection des professeurs de médecine est fondé sur un concours sur les titres obtenus ( tous les candidats ont les mêmes) et sur les travaux de recherche scientique effectués. Faute de moyens de la recherche publique, nos jeunes confrères sont contraints de se livrer à un travail de compilation par ordinateur de la littérature internationale en langue anglaise. Le principe est simplement de publier des études sur des études dans des revues cotées, le plus souvent américaines. Cela ne coûte pas cher, à l'évidence. Est-ce bien une façon de recruter les praticiens les plus aptes à transmettre leurs connaissances aux plus jeunes ? Est-ce bien une façon efficace de sélectionner les esprits les plus créatifs et les plus compétents pour mener des équipes ? Faut-il s'étonner de la si faible capacité d'innovation et de découverte médicale de la 4ème puissance économique du Monde ? Quel avenir pour ces médecins d'écran ?

 

Renforcer la compétence

- Pourtant, les professionnels de santé francophones que nous avons la chance de rencontrer ne restent pas passifs. L'Université est loin d'être toujours leur locomotive, mais beaucoup, à travers des associations ( et des publications Internet ) prennent des initiatives pour améliorer leurs pratiques, sans attendre la moindre bénédiction d'en haut. Chacun, de plus en plus, semble tenir à reprendre la direction de sa profession que de multiples institutions ont tenté, en vain, de confisquer. Une certaine fierté d'être un soignant est en train de refaire surface, après des années désespérantes de dépression collective.

Un médecin bien dans sa peau a toutes les chances de fournir les meilleurs soins possibles, n'est-ce pas ?

 

Os court : « La gloutonnerie n'est pas un vice secret. » Orson Wells

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LEM 171 du 9 novembre 2000

Cultiver le disensus

Dr F-M. Michaut

Plusieurs échanges de courrier avec des colistiers de la liste Exmed1 méritent un arrêt sur image. L'un de nos lecteurs se préoccupe quelque peu de l'accent corporatiste, poujadiste et de la connotation conservatrice, pour ne pas dire ultra-droitiste de certains messages. Voilà qui pose la question de la ligne éditoriale de notre publication sur le Net de santé. Faut-il rappeler que nous avons commencé notre aventure commune il y a trois ans, quand Monsieur Juppé, alors premier ministre, a lancé son plan de sauvetage de l'assurance maladie à la française. De façon totalement autoritaire, il a soutenu à la Nation qu'il n'y avait aucune autre façon possible de sauver les comptes de cette institution cinquantenaire. Souvenez-vous, c'est devant le silence de mort d'une profession accusée de tous les torts et de tous les maux, que quelques uns ont pris d'eux-même l'initiative de dire : « Les professionnels de santé ne peuvent rester muets devant une telle façon de mettre en danger notre fonction même de médecins et de soigants. Nous devons nous exprimer, dire enfin ce que nous pensons » . Nous avions besoin qu'il y ait de l'expression médicale. En vérité, notre tort a été d'utiliser un singulier porteur d'ambiguité. Car, à l'usage, et Dieu merci, il y a parmi nous comme ailleurs de multiples expressions médicales. La recherche à tout prix d'un consensus n'est pas du tout dans nos préoccupations. Qu'il puisse y avoir autour d'Exmed des façons variables et variées de sentir les choses de la santé, en un mot un large disensus, est notre objectif affiché.

 

Retrouver la confiance

- L'une des règles du Talmud peut surprendre notre "logique cartésienne". Si tout le monde est d'accord pour condamner un accusé, relâchez-le, il est sûrement innocent. Le Pr Mylène Baum dans un message Internet à Exmed1 consacré à l'usage du génome humain, ne dit finalement pas autre chose quand elle souligne le danger de la pensée consensuelle et la nécessité du disensus. Sans disensus, pas de démocratie. Dès qu'il y a une seule pensée unique ( comme en matière d'économie actuellement ) le totalitarisme s'installe.

 

Restaurer la conscience

- Cependant pour la communauté médicale, le règne des conférences de consensus se poursuit avec acharnement. Il s'agit simplement, comme on le sait, de rassembler une assemblée d'experts reconnus d'une question médicale pour déterminer le plus rigoureusement possible quelle est l'opinion du moment. Il s'agit donc d'une moyenne statistique des connaissances des uns et des autres, les points de vue les plus extrêmes, des plus démodés aux plus novateurs se trouvant ainsi éliminés. La thérapeutique obéit aussi souvent à une telle volonté de planification de l'imprévisible humain pour conduire à ce qu'on appelle des protocoles de soins.

 

Renforcer la compétence

- Il serait puéril de contester l'intérêt pratique et collectif de pareils efforts d'amélioration de la qualité des connaissances et de la qualité des soins. Il serait naïf de ne pas en mesurer les limites et les effets pervers. Chaque soignant, comme chaque soigné, sait bien que telle molécule n'aura pas tout à fait, ou pas du tout, le même effet avec Pierre ou avec Jeanne. Et naturellement pas du tout la même action selon le prescripteur. La médecine ne peut pas être un simple recueil de recettes de cuisine. Voilà qui ennuie si fort nos médecins d'écrans ou de papier, dont les recommandations et autres injonctions aux cliniciens, au nom magique de la " santé publique", entrent par une oreille et sortent aussi vite par l'autre. Qu'un homme en soigne un autre, et qu'il parvienne ainsi à l'aider, reste quoi qu'on fasse un grand mystère.

 

Os court : « Conseil aux centenaires : dépêchez-vous. » Pierre Desproges

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