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 N° 582
 
 
 
      5 janvier 2009  
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Et si nous surfions sur la crise ?

Photo de l'auteurDocteur François-Marie Michaut lui écrire

xxxQui n’a pas les oreilles bourdonnantes de cette crise financière d’abord locale, puis, par ricochet, économique mondiale ? Les énormes marchés qui entourent le champ de la santé vont probablement connaître eux aussi des perturbations spectaculaires. Nous voici pourtant revenus à une vision de la réalité du monde bien plus proche de ce que connaissent tous les professionnels de la santé, et du vivant en général. La croissance continue et régulière de quelque organisme que ce soit, nous ne l’observons jamais. Dans le biologique, rien n’est jamais linéaire, il n’y jamais d’aller sans retour, il n’y a jamais de vie sans mort. Il n’y a jamais d’évolution possible sans le passage obligatoire par des phases de crise.

retrouver la confiance

xxxComme bien d’autres, nous avons été entraînés par un mouvement de développement très rapide de nos technosciences médicales. Avec enthousiasme, nous avons croqué à belles dents dans une course vers ce que nous pensions quelque peu naïvement être une avancée vers un monde délivré de la maladie et des handicaps. En faisant aveuglément confiance aux beaux parleurs, nous avons laissé se mettre en place de multiples rouages censés nous conduire à une médecine idéale. Les sirènes de l’argent et de la gloire, habilement orchestrées, ont su endormir bien des consciences professionnelles. La santé est devenue un marché juteux, et la médecine une profession enviée et jalousée pour ses revenus financiers.
Alors, tout le monde tenant ainsi tout le monde comme dans un système mafieux, et quels que soient les emballements des dépenses de soins par rapport aux recettes des assurances maladie, un consensus muet s’est établi. Faisons le dos rond, ne prenons surtout pas la moindre initiative pour que les choses changent.

restaurer la conscience

xxxEt brutalement nous saute à la figure la certitude que cet édifice complexe de la santé tel que nous le connaissons aujourd’hui est aussi fragile que celui des marchés financiers mondiaux . Comme en plus, il en est devenu au fil du temps étroitement tributaire, nous voici confrontés aux mêmes incertitudes et turbulences. Surtout, nous voici placés devant la même obligation. Ou bien nous sommes capables de définir de nouvelles valeurs pour agir de façon conforme à la réalité, ou bien nous disparaissons.
xxxIl est impossible que les hommes investis dans le fonctionnement d’un pouvoir en place renoncent à vouloir avant tout défendre leur territoire. En termes systémiques, on parle alors de maintien de l’homéostasie. Le résultat en est l’impossibilité de tout changement vrai. Voilà qui complique sérieusement la donne pour le citoyen ordinaire habitué à ce qu’on fasse tout à sa place : avec la crise, ce sont toutes nos élites en place qui sont en voie de discréditation.

 

renforcer la compétence

xxxFaut-il pour autant se couvrir la tête de cendres et se déchirer les joues avec les ongles en maudissant les dieux de contraindre ainsi nos princes à l’impuissance ? N’est-ce pas plutôt le moment de nous livrer à une recherche jusqu’à ce jour négligée ? A côté des talents reconnus et encensés par la rumeur publique, n’existe-t-il vraiment personne d’autre ? Par là, qu’on ne s’y trompe pas, je ne veux pas du tout évoquer la figure toujours détestable, et terriblement dangereuse dans tous les cas, d’un quelconque homme miracle.
Dans les périodes difficiles de leur histoire, les nations ont su trouver dans leur sein les forces vives qui leur étaient nécessaires pour tenter de survivre. Tout comme un organisme vivant en bon état fait appel à son système immunitaire pour contrer les attaques des micro organismes qui l’envahissent.
Il est bien difficile de jouer les prophètes, l’avenir, notre avenir à tous reste ouvert, et il sera exactement ce que nous en ferons. Ce qui s’est déjà profondément modifié est cependant capital. Nous allons enfin être obligés de changer, ce qui, en soi, est une excellente nouvelle tant les blocages irréductibles de tout notre système de santé ne pouvaient nous conduire qu’à l’abîme.
Alors, quitte à faire bondir des âmes généreuses, j’ose, avec finalement beaucoup d’autres, donc sans une once d’originalité, écrire : vive la crise.
Pour le mot de la fin, permettez-moi de citer Bertrand Kiefer, médecin suisse, le 19 décembre 2007 (1), donc bien avant << la crise >> : << L es médecins sont les pionniers du monde futur, celui où les ressources seront partout comptées et où il faudra repenser en profondeur la signification de cette valeur centrale de notre culture : la croissance. Il n’est jamais facile d’être des pionniers. >>.

(1) B.Kiefer , Vers une médecine durable ? In Revue Médicale Suisse N° 138, décembre 2007 http://titan.medhyg.ch/mh/formation/article.php3?sid=31389999#


NDLR : Cette lettre illustre l’article 6 de notre
CHARTE D'HIPPOCRATE . Lien

- 6°) Je ne détournerai pas l’exercice médical de son objectif premier, le service du patient, en le réduisant au seul appât du gain ou de la gloire personnelle.



Os court :<< En cachant quelque chose, vous vous découvrez. >>
Louis Scutenaire


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