Mon jeune ami Etienne est un fou de théâtre
Et monter sur les planches est son rêve opiniâtre.
Il planche donc sur des textes qu'il déclame sans succès
Comme des planches de salut pour tenter de percer.
Pour les vraies planches, lui dis-je, tu devras repasser
Ton fer est bien trop froid et ton public glacé.
Pour évacuer ce trac quand tu joues le dimanche
Il reste beaucoup à faire, c'est du pain sur la planche !
Peut-être me dit-il, devrais-je changer de planche ?
Et avec celle de surf pourrais-je prendre ma revanche ?
Si le plancher des vaches ne veut pas m'exaucer,
Sur les planches de Deauville je tenterais un essai.
Avec une planche à voile, je gagnerai des régates,
Et aux jeux olympiques irait jouer l'acrobate.
Pourquoi pas faire la planche entre deux déferlantes,
Et me laisser bercer au soleil du farniente ?
Si ça ne marche pas, j'essaierai charcutier ;
Sa planche à découper est facile à manier.
Si Etienne lâche les planches, ce n'est pas à dessein ;
Devra-t-il se rabattre sur la planche à dessin ?
Et comme un menuisier sur sa planche de vingt deux,
Ou sur celle de trente quatre, raboter de son mieux ?
Ou bien en chaudronnerie où la planche se situe,
Entre la mince tôle et le plat plus trapu ?
Et le chef en cuisine ? Sa planche à émincer ?
Il l'essaiera aussi, si c'est la panacée !
Faute de brûler les planches Etienne patientera
Et s'il veut faire médecine, bien des planches apprendra.
Sur celles d'anatomie à l'hôpital planchera,
Et c'est pied au plancher qu'il les révisera !
C'est à un taux plancher que la banque lui prêtera
Débarrassant plancher si trop de dettes verra.
Que d'une planche à pain, jamais il ne s'éprenne !
Ainsi aurais-je planché sur l'avenir d'Etienne.
Qu'aurait dit Gustave Planche, carabin littéraire,
De ces planches repassées en curieux inventaire ?
Que les mots, comme des planches, pour passer les idées,
Enjambent les crevasses sans même s'encorder ?
Mes idées sont légères, une planchette suffira,
Pour la bise éphémère qui les emportera …
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