Depuis l'antiquité, novembre est marqué par des cérémonies religieuses et civiles liées à la mort. Et pourtant ce mois automnal est un farceur. De son rang de neuvième mois du calendrier républicain romain, il tire sa dénomination.
Un certain Jules César, alors empereur, mit en place l'année de douze mois, et novembre devint le onzième d'entre eux.
Du côté de la médecine, l'actualité récente en témoigne, les attitudes devant la mort, terme final de tant de maladies, sont fort variables. Il n'y a ni consensus, ni doctrine scientifique s'imposant à la profession. Juste une règle déontologique sans cesse reprise depuis Hippocrate.
Dans l'opinion, se fait jour une demande de plus en plus insistante pour que chacun puisse choisir de mourir et que le corps médical fasse en sorte que cette fin désirée se déroule dans le meilleur confort technique.
Alors, comme d'habitude, les pour et les contre donnent de la voix pour que leurs opinions soient reconnues comme un droit. C'est à dire que les façons de mourir soient encadrées par la loi qui s'impose à tous.
Peu importe ici les motivations. Qu'il s'agisse d'un choix religieux, d'une opinion philosophique ou d'une recherche de confort personnel, toutes ces options existent et ont, en Europe, le droit de s'exprimer.
Passons sans pitié sur le grill cette médecine qui a tant de mal à parler de la mort. Quand j'étais étudiant, au même titre que celui de cancer qualifié de mitose, ce mot était interdit dans les hôpitaux. On parlait devant le lit des patients des salles communes d'antan d'exitus. Hypocrisie paternaliste, bien entendu.
Puis le diagnostic de mort, simple arrêt définitif du coeur, s'est rapidement compliqué pour tenir compte de l'activité électrique du cerveau. Les avancées des techniques de réanimation et des connaissances scientifiques nous ont obligés à plus de rigueur encore.
Ce qui a bouleversé la façon de concevoir le terme de toute substance vivante est la notion d'apoptose. https://fr.wikipedia.org/wiki/Apoptose
Le terme lui-même est intéressant. La ptose, pour les médecins, c'est ce qui tombe ( ptose mammaire par exemple). Le préfixe grec apo indique ce qui vient de loin.
Au risque de schématiser à l'extrême une réalité complexe, voici, en langage ordinaire, ce dont il s'agit. Tout se passe comme si, pour se maintenir en vie, certains cellules parmi les plus importantes, recevaient en permanence un message de l'organisme leur signifiant qu'il a besoin de leur bon fonctionnement. Une sorte de programmation à distance et souvent génétiquement déterminée. Des organes entiers se font puis disparaissent au cours de la vie embryonnaire. Citons, chez l'homme, les branchies qui deviendront des poumons et le thymus ( chez les bovins c'est le ris de veau) qui disparait avant la naissance.
Une sorte d'ordre semble se produire : cellule, tu n'es plus utile, tu dois disparaitre.
La pathologie tient aussi un grand compte de l'apoptose. Ainsi les maladies cancéreuses semblent être le résultat d'une « panne » de l'apoptose. Incapables de cesser leur activité, les cellules malignes prolifèrent de la façon invasive que l'on connait. Inversement, un emballement de l'apoptose, stimulant la lutte contre les anticorps, est évoqué dans la genèse du SIDA.
Peu importe si les explications données ici sont parcellaires ou incomplètes, les curieux sauront trouver les informations adéquates.
L'important me semble simplement de prendre conscience que les questions de vie et de mort ne peuvent se suffire d'opinions simplistes ou d'émotions à l'emporte-pièce. Là encore, la connaissance, sous toutes ses formes et sans s'enfermer dans des limites imperméables, demeure irremplaçable pour la bonne santé de la conscience de chacun.
La façon remarquablement intelligente dont le vivant parvient à réguler ses propres constituants est une grande leçon de systémique. Puissions-nous savoir le reconnaître et l'imiter pour conduire nos actions. Y compris les plus «définitives».
Os court :
« Tout refus du langage est une mort. »
Roland Barthes