La Science sacralisée a péri

                                   27 avril 2020

   Il y a peu, notre premier ministre, chargé de faire passer la pilule amère du confinement dans nos cerveaux gaulois prompts à la contestation, a annoncé la couleur. Il a affirmé qu'il n'avait qu'une seule boussole pour diriger ses décisions. Celle de la science recueillie auprès des autorités scientifiques. La pensée politique se soumettant totalement à la pensée scientifique, cette zoonose (1) imposerait-elle l'instauration de la science comme le sommet indépassable de ce que l'esprit humain est capable de savoir et de comprendre ?

   Cette idée grandiose d'une Science avec une majuscule, unique et digne de toute confiance en ses progrès est assez répandue. Et cela, d'autant plus qu'elle est mal connue, la vraie science. Y compris des sujets sélectionnés pour être l'élite dirigeante de la nation (2). Une science unique, cela n'existe pas et pour une raison simple. Toute science se définit soigneusement elle-même par l'objet même de la connaissance qu'elle explore. Tout débordement hors de son domaine est interdit, ou sévèrement contrôlé. Cette Science imaginaire dans sa toute puissance a pris le statut d'une véritable religion parce quelle est fondée sur une croyance implicite : hors d'elle, point de salut. Nos anciens avaient cru ainsi à la Civilisation ou au Progrès, avec les conséquences catastrophiques que nous connaissons.

  Cela posé, toute discipline scientifique a sa raison d'être, et mérite amplement, à ce titre, d'être respectée. Les humains qui y consacrent leur vie professionnelle, leur passion, leur patience et leurs efforts, souvent invisibles pour le public, sont des gens indispensables. C'est stupide de le contester quand nous utilisons automatiquement chaque jour leurs retombées techniques. Le Coronavirus souligne sans ménagement qu'il nous faut collectivement ouvrir les yeux sur la réalité. Le vrai métier quotidien des gens de science est de faire tous les efforts possibles pour éprouver la solidité de ce que démontrent leurs collègues. La découverte est une exception, la contestation, une obligation professionnelle (3). Creuset de la contestation systématique, de la discussion sans fin possible, chacun le constate avec le flux incessant des observations sur ce fameux virus dont nous ne savons pas grand chose et que nous ne savons pas encore traiter ou prévenir.

   La boussole chère au gouvernement d'Édouard Philippe nous révèle qu'elle ne peut indiquer aucun nord. Son aiguille ne cesse d'osciller. Ce qui aggrave encore notre désarroi d'assurés de tout danger, c'est que les esprits scientifiques ne cessent de douter et de se diviser. Ils nous demandent du temps, encore du temps, toujours du temps pour conforter ou infirmer leurs hypothèses. Et nous, nous tremblons en voyant le torchon de la pandémie brûler, et les conséquences de nos stratégies d'évitement nous revenir dessus à la vitesse de l'éclair.

  Nous voici, une fois encore, en deuil d'une grande idée qui a fait rêver et espérer les hommes au fil des siècles avant de sombrer. Le grand gourou ayant le monopole de toute connaissance objective n'existe pas, nous sommes nus devant ce que la réalité nous envoie. Pas moyen de s'appuyer sur la moindre certitude, aucun secours à attendre d'une quelconque divinité en laquelle nous ne croyons plus dans nos pays occidentaux. Comme le catéchisme transhumaniste est plongé dans un coma profond par ce petit virus insolent.

   Que nous reste-t-il alors ? Nos cerveaux humains dans toute leur plénitude. Nous sommes fort loin d'en avoir exploré tous les rouages, toutes les faiblesses et toutes les richesses cachées (4).
   En attendant, acceptons qu'il n'existe pour tous qu'une seule certitude : celle que, quoi que nous fassions, nous mourrons tous un jour. Alors que vive aussi bien que possible la vie.


Notes :

(1) Dénomination médicale des affections virales animales transmises à l'homme.

(2) Les médecins praticiens sont régulièrement frappés par l'ignorance de tout ce qui peut toucher au corps et à son fonctionnement chez des sujets très cultivés. Le vernis des notions grapillées sur Internet et l'usage de termes techniques incompris ne fait pas illusion.

(3) Rupert Sheldrake, Réenchanter la science, Albin Michel 2013 ISBN 978-2-226-24545-8

(4) Un texte prémonitoire éclairant de 1976 de la femme de lettres Dominique Aubier, Le devenir du Monde est lié à celui de l'Homme, Editions MLL, 2016, ISBN 2-9165999-08-O8


 


   Os court :

« Ayez le courage de regarder la réalité en face. Alors seulement on pourra peut-être faire quelque chose.»

H.G Wells (1866-1946)

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