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Lettre
d'Expression médicale n°290
Hebdomadaire francophone de santé
21 Avril 2003
Cela
vient de la tête
Dr Jacques
Blais
Ce texte n'aura qu'une ambition, celle de tenter de clarifier, plus
exactement de dire autrement ce autour de quoi tournent et virent
nombre de nos échanges, qui essaient - comme chacun inconsciemment
passe son temps à le faire - de recouvrir, de masquer, d'éliminer,
de cacher sous d'autres expressions ce que dit leur être.
Explication de texte. Lorsque certaines de nos ouvertures sous formes
d'encarts, de coups d'oeil attirant l'attention sur une publication,
un livre, une étude publiée, illustrent des applications
ayant trait à des thérapies, des abords psychologiques,
une autre manière de considérer l'exercice médical,
bien des mots et expressions surgissent alors : refoulement du psy,
besoin de tout analyser, terrible habitude devenant attitude de
voir du psychisme derrière des symptômes, voire même
des allusions à la négation des "autres formes"
de médecine, etc. Il apparaît donc intéressant
de tenter une approche différente pour essayer de trouver
un éclairage constructif.
Retrouver la confiance:
Cette toute première façon qui nous est habituelle
ici de "délimiter des chapitres" est parfaitement
dans l'axe du jour. En effet, le réflexe initial, immédiatement
après toute remarque ou hypothèse d'une participation
du psychisme à des troubles d'apparence ou de manifestation
physique est d'imaginer une mise en doute. Autrement dit une question
de confiance.
"Je vous annonce des signes cliniques, des symptômes
ressentis, et vous semblez immédiatement supposer que cela
vient de ma tête. Vous ne me faites pas confiance ?"
Ouvrons le livre de nos vies. Quoi de moins "maladif"
qu'une grossesse désirée, à déroulement
normal ? Or, que la parturiente l'accepte ou non, le ressente ou
le refuse, le verbalise ou le nie, s'en préoccupe ou sans
défende, d'autres ont enfanté et accouché avant
elle. Et de ce simple fait sa manière de ressentir, d'appréhender,
de vivre, de craindre, d'espérer, de parcourir sa propre
grossesse est automatiquement, systématiquement plutôt
de par cette appartenance à ces ensembles et sous ensembles
sociaux, ethniques, familiaux, religieux, à ces croyances
et ces traditions, liée à des références
qui mèneront la future mère vers des manifestations,
sentiments et comportements. Bonheur, peur, joie, fierté,
ou permanentes pensées négatives, images de complications,
d'accidents, de morts, de malformations, ou aspects de paix et de
tranquille évolution. Quoi qu'elle pense et fasse, la mère
est imprégnée de croyances, de rituels, d'opinions,
d'influences, d'acquisitions et d'expériences, de réflexions
et de projections.
Un cancer est on ne peut plus une manifestation corporelle de maladie,
comme un infarctus, une hépatite, une polyarthrite, etc.
Mais pourtant, chaque individu vivra différemment la même
pathologie, n'étant en cela de nouveau que le reflet de ses
apprentissages, de son éducation, de sa vision du monde,
de ses croyances, de son éventuelle religion, de son appartenance
sociale, économique, anthropologique, ethnique, professionnelle.
Restaurer la conscience
Un degré suivant est de considérer que le médecin
lui-même, ou le soignant en général, est également
issu d'un parcours personnel, de croyances et de critères
reçus et fabriqués, de convictions, de formations
différentes, d'une origine, d'une ethnie, d'une éventuelle
religion, et de toutes ses expériences de succès ou
d'échecs, de sa situation sociale, familiale, économique,
professionnelle. Et de ses choix de cette profession voulue ou subie,
qui le passionne ou l'affole, le déçoit ou l'enthousiasme.
De sorte que l'étape fondamentale est de considérer
que, dans toutes les circonstances où ils se rencontrent,
le patient et le soignant n'apportent pas qu'eux-mêmes, leur
pathologie d'un côté et un savoir en échange,
mais infiniment plus, tous ces parcours, ces expériences,
ces vécus, ces ouvertures ou fermetures d'esprit, ces entrains
ou ces freins, ces fictions et ces réalités.
Quels que soient alors les signes, les symptômes, les méthodes
d'investigation, les évolutions, les diagnostics, il ne peut
jamais exister d'une part une sorte de planche de lecture d'une
pathologie déterminée par les livres et relevant d'un
traitement validé, et d'autre part deux individualités
ou bien davantage dans nombre de situations où les intervenants
sont multiples, nantis pour les uns de la réponse médicale
et pour le ou les autres de la demande de soins.
Si sept patients sur dix en consultation de médecine générale,
ayant parfaitement eu de nombreuses raisons variées de venir
consulter, n'apportaient avec le recul du diagnostic et de l'évolution
que leur existence à partager sous des expressions multiples
avec ou sans apparence médicale, il n'en reste pas moins
que certains présentaient ce jour là et une rhinite
obstructive et des rhumatismes et une dépression réactionnelle,
quand d'autres étaient porteurs d'angoisse majeure sous toutes
sortes de formes d'expression. Malheureusement la formulation du
patient, son humeur du jour, enveloppées dans son vécu,
ses antécédents, ses caractéristiques ethniques,
sociales, familiales, professionnelles, ses croyances, etc, confrontées
à l'humeur du praticien, ses propres angoisses, ses caractéristiques
personnelles de tous ordres, n'auront permis ni entente ni
écoute. Et de ce fait ni thérapeutique, ni thérapie,
ni évaluation satisfaisante, ni satisfaction. Et souvent
heureusement l'inverse absolu...
Renforcer la compétence:
L'objectif, pour les praticiens et soignants qui perçoivent
le patient dans une globalité très large, automatiquement
imprégnée alors des marques de tous les apports et
de tous les parcours, est de faire comprendre et accepter un point
de vue. Il n'est jamais, jamais question de nier, de refuser, de
refouler, de récuser, le discours du patient, sa façon
personnelle d'exprimer tant ses douleurs et signes physiques, sa
manière propre de construire son descriptif avec une hiérarchie,
une symbolique, des mises en avant et des oublis, des évidences
cliniques et des non-dits non moins supposables. Il est seulement perpétuellement
souhaitable que la lecture par le praticien soit globale, entière,
tant celle de l'apparence, du descriptif, du miroir, des examens
et de la clinique, des paroles et des récits, que celle
du non verbal, des attitudes et des sens cachés, de la glace
sans tain, ou que les découvertes de ces placards soudain
et enfin ouverts des antécédents, du vécu,
des origines, de la culture et des croyances, des souffrances.
Savoir tout simplement que, sans avoir besoin d'employer ces expressions
de refoulé, de psy, ces nominations qui constituent encore
des refus ou des écrans, il ne peut pas se trouver de patient
dépourvu de tout ce qui représente son existence indépendammant
des symptômes du jour, et il ne saurait davantage exister
de soignant lui aussi vierge d'un vécu et d'apprentissages
et d'expériences qui modifient sa perception, sa réceptivité.
Accepter alors enfin que l'essentiel pour tous les êtres qui
viennent livrer chez un soignant une facette ou un miroir, ou un
coffre-fort, ou un puits ou un trésor représentant
leur existence et leur vie, soit de pouvoir présumer que
leur dépôt fera l'objet d'une lecture non seulement
attentive mais réceptive, d'une écoute, et ensuite
d'une proposition de thérapeutique, le cadre de la vie, et
si besoin d'une thérapie, le cadre de l'existence, toutes
adaptées. La thérapeutique, le soin, le traitement,
la réparation, allant à travers tout un éventail
chimique ou physiologique ou technique, la thérapie, l'assistance,
l'aide, la reconstruction, couvrant un autre immense univers, depuis
la simple écoute dialoguée jusqu'à un scenario
précis validé, qu'il devienne par utilité ou
nécessité alors analytique, comportemental, ou systémique.
L'expression qui dérange, finalement, ne signifierait-elle
pas, dite autrement "je ne peux pas recevoir votre version
parce c'est moi qui sais" valable dans les deux sens, pour
le soignant comme pour le souffrant, quand elle aurait pu, avec
une perception et une acceptation différentes, signifier
: "pour le moment je ne parviens pas encore à décrypter
votre langage, mais dès que je saurai le recevoir et
le lire j'en déchiffrerai les signes en vous demandant de
confirmer".
l'os
court :
«
Une tête ailée vaut mieux quun coeur avec des
testicules»
Lichtenberg
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d'Expression médicale n°291
Hebdomadaire francophone de santé
28 Avril 2003
Derrière
les maladies (1) : une série pour comprendre
Dr François Michaut
Souvenons-nous. La médecine
fut longtemps enseignée dans nos vieilles universités
européennes à partir de livres considérés
comme sacrés. Molière en parle bien en décrivant
- sous le mode humoristique - les débats en langue latine
des écrits d'Aristote et d'Hippocrate. Dans les pas de François
Magendie (1783 - 1855), l'observation directe du malade conduisit
à la méthode anatomo-clinique qui guide toujours notre
médecine. La séquence examen, diagnostic, traitement
résume encore ce que fait le médecin face au malade
qui fait appel à lui.
Retrouver la confiance:
Une telle conception de l'exercice médical, même si
elle peut se targuer à juste titre de remarquables succès
pour traiter les maux les plus graves, ne fait pas forcément
l'affaire ni de ceux qui sont soignés, ni ... de ceux qui
soignent. L'homme dans son lit, pas plus que l'homme en blouse blanche,
ne sont de simples machines. C'est à la suite d'un double
mouvement associant progressivement des patients et des médecins
qu'une question s'est posée. Dans la mesure où la
survenue des maladies a cessé d'être considérée
comme un châtiment divin à des fautes individuelles
ou collective, qu'y-a-t-il donc derrière nos pathologies
?
Restaurer la conscience
Au delà du diagnostic de lésion d'organe ( quand nous
savons le faire ), de maladie bien identifiée comme un cancer
ou un infarctus, nous avons de plus en plus conscience qu'il y a
autre chose à tenter de décrypter. La maladie n'est
pas un accident, une simple panne d'une pièce d'un organisme
vivant. Elle touche un être humain, elle est une phase importante
de sa vie. Elle a, tel un arbre, des racines souterraines en bien
plus grand nombre que ses rameaux aériens les seuls visibles
aux yeux de tous. Lhumain dans la médecine nest
pas un simple badigeon superficiel, mis là comme la cerise
sur le gâteau, juste pour faire plaisir, ou, plus grave encore,
pour se faire plaisir en adoptant les atours du bon docteur.
Renforcer la compétence:
Fidèles à notre objectif de renforcer notre compétence,
nous faisons le choix de traiter à trois voix ( Yves Adénis-Lamarre,
Jacques Blais et François-Marie Michaut ) trois abords différents
de la forêt que cachent les arbres de nos maladies. Chacun
de nous, avec son style personnel, va livrer dans une LEM spécifique
une illustration de trois abords possibles actuellement. La première
( Adénis-Lamarre) s'intéressera à l'abord comportementaliste.
Le médecin concentre alors son attention sur l'analyse des
comportements qui ont conduit à la maladie, en vue de pouvoir
les modifier. La deuxième ( Blais) concernera la compréhension
de l'ensemble des systèmes - et des interactions de leurs
éléments constitutifs - dans lesquels la maladie,
aussi bien somatique que psychique, exerce une fonction de tout
premier temps qu'il est important de comprendre. La dernière
(Michaut) tentera de montrer l'importance de notre psychisme inconscient
dans le développement et l'évolution des maladies,
y compris les plus habituelles. La maladie est une expression de
cet inconscient qui nous actionne bien malgré nous, même
si nous en nions l'existence ou l'importance.
Triple éclairage, parmi d'autres possibles, répétons-le,
pour améliorer encore la qualité des soins dus à
nos malades. Il n'y a pas de volonté de vouloir démontrer
la supériorité d'un abord sur un autre. Car chacune
de ces trois façons de tenter de répondre à
une demande de changement, ou de non changement, du patient a ses
propres indications, contre-indications et limites de mise en oeuvre.
La compétence du médecin, sa personnalité celle
de chaque malade participent également à la complexité
extrême de la situation. Qu'il soit bien entendu que nos différentes
LEM de cette série Derrière la maladie
ne se veulent que de modestes contributions à cette métamédecine
qui nous est si chère à Exmed.
l'os
court :
« Le médecin
: - Votre mari na rien. Il croit quil est malade. La
dame peu après au célèbre docteur : - Mon mari
croit quil est mort.»
Jules Renard
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d'Expression médicale n°292
Hebdomadaire francophone de santé
5 Mai 2003
Derrière
les maladies (2) : abord comportemental
Dr Yves Adénis-Lamarre
Janine, trente ans, ne peut plus toucher
un couteau; ni une aiguille : ça pourrait être trop
dangereux. Ni mettre une prise de courant, ni ouvrir sa boîte
aux lettres : «Si mon fils était là, est ce
que je pourrais le coincer dedans ? » En revenant de la vigne,
pour rentrer chez elle, il lui faut passer devant un puits, mais
bien qu'il soit recouvert dune grille cadenassée cest
trop angoissant, elle est obligée de rester une heure devant
en se demandant : « Sil était ouvert, est-ce
que je me jetterais dedans?» Alors, elle fait un détour
pour éviter ce lieu générateur dangoisse,
mais il faut alors passer devant une maison en construction, et
bien qu'il manque les deux marches de lescalier dentrée
: « Et si mon fils était là, est-ce que je pourrais
le pousser dans lescalier?». Cela entraîne un
nouveau détour lobligeant à passer non loin
dun voisin qui travaille dans sa vigne. «Va-t-il remarquer
le détour que je fais ? ». Alors elle ramasse un sarment
de vigne, sen sert comme dun fusil en direction de son
mari, fait trois pas en avant, trois pas en arrière, de façon
répétitive, en regardant le voisin pour voir si ce
dernier se rend compte de quelque chose.
Retrouver la confiance:
Cétait en 1977, Janine suivait une psychothérapie
depuis 5 ans, elle prenait plusieurs psychotropes, et malgré
cela, son état se développait de jour en jour à
limage dune tache dhuile qui sétend
progressivement, avec des symptômes de plus en plus nombreux.
Il lui a été proposé en dernier recours une
hospitalisation, ce qu'elle redoutait par dessus tout. Parallèlement,
elle consultait une tireuse de carte, mais cela ne changeait rien
non plus, et cest cette dernière qui la adressé
à son médecin généraliste, car la tireuse
de cartes était originaire du même village que le médecin.
Janine ne comprenait pas ce qui lui arrivait, elle sentait tout
le ridicule de la situation, tout ce qu'elle faisait létait
malgré sa volonté, elle ne demandait qu'une chose
: être débarrassée de tout ces symptômes
qui gâchent sa vie et celle des siens. Ce nouveau médecin
était son dernier recours, elle était prête
à tout. Le jeune médecin lui explique ce dont elle
souffre, il lui parle dune nouvelle approche thérapeutique:
la thérapie comportementale de Wolpe, il lui propose de se
renseigner pour trouver un médecin capable de la prendre
en charge avec cette méthode. Elle avait perdu toute confiance
en elle, elle avait perdu confiance en la médecine, les possibilités
dune nouvelle approche qu'elle ne connaissait pas lui permirent
de retrouver un peu de cette confiance perdue, et elle répondit
à ce jeune médecin : «Non, je ne veux personne
dautre, je veux que ce soit vous qui maidiez».
Le médecin na pas pu lui refuser, cela fut une aventure
denviron un an.
Restaurer la conscience
Comment Janine en était arrivée là? Comment
cela avait-il commencé? Janine était amoureuse dun
garçon de son village, et comme cela arrive de temps en temps,
le garçon est parti à la ville pour un travail. Elle
ne la jamais revu. Janine était dans un état
que lon peut qualifier de dépressif, elle était
absente, elle était dans ses rêves, jusqu'au jour de
laccident. Car un jour, alors qu'elle était dans son
jardin en train de cueillir des fleurs, en présence dune
petite nièce, elle vit sa mère égorger un lapin
avec un couteau. A cet instant précis, elle eut cette pensée:
«Et si javais eu un couteau, est-ce que jaurais
pu faire ça à ma petite nièce?» Quelques
années passèrent, elle se maria, eut un garçon.
Un jour qu'il criait plus fort qu'à laccoutumée,
alors qu'elle épluchait des légumes avec un couteau,
cette même idée revint en réponse à cette
piqûre de rappel que fut ce nouvel événement
dont certains éléments, bien que dans le désordre,
étaient identiques au précédent, et tout bascula
dans sa vie, pendant cinq longues années.
Le questionnement systématique, première étape
de la thérapie comportementale, vise à retrouver tous
les symptômes présentés et leurs enchaînements
progressifs afin de pouvoir agir au niveau comportemental de la
personnalité. Mais permet aussi de restaurer à la
conscience le point de naissance du dysfonctionnement de ce système
qu'est une personne humaine, pour vérifier que la naissance
du problème ne se situe pas à un autre niveau logique
de la personnalité, afin de savoir si une action thérapeutique
au niveau logique comportemental a des chances de réussite.
Janine était une adulte comme les autres, comme chez les
autres son écologie était en équilibre,
avec ses qualités et ses défauts, mais un jour, alors
que son système émotif était en déséquilibre,
offrant une faiblesse passagère de ses capacités,
lenvironnement offrit un spectacle que lon peut considérer
comme accidentel, dans la mesure où si cet événement
nétait pas apparu, Janine naurait sans doute
jamais eu les symptômes qu'elle a présentés.
Certes, si Janine navait pas été dépressive,
elle naurait sans doute jamais présenté ces
symptômes, mais le traitement de sa dépression na
pas eu raison de ses symptômes. Si Janine navait jamais
eu de premier amour, Janine naurait jamais eu cette dépression.
Mais la dépression de Janine nest-elle pas plutôt
liée à son éducation? A lécologie
de son milieu familial quand elle était enfant? Lors du questionnement
systématique, Janine avait écrit qu'à lâge
de 7 ou 8 ans, alors qu'elle jouait à la ronde avec trois
autres petites filles, elle a eu envie de faire tomber lune
delles qui avait trois ou quatre ans. En fait, toute sa petite
enfance semble avoir été perturbée avec sa
vision actuelle de son passé - par des relations conflictuelles
avec sa famille, ses camarades de classe, les institutrices. Cette
coloration de Janine, ce comportement ou le sentiment qui le sous-tendait,
cette envie de pousser et de faire mal à un enfant, semble
être lélément clé de son histoire
pathologique, mais quelle est son origine? Une croyance familiale
qui se manifeste par ce comportement chez Janine? Un schéma
comportemental familial ou issu du milieu scolaire peut-il avoir
engendré malgré elle un tel sentiment chez Janine?
Mais peut-on séparer sentiment et comportement, ne sagit-il
pas là de deux aspects complémentaires et indissociables
dun même processus dont une possible composante génétique
a permis léclosion? Janine, femme de la campagne savait
une partie du comment elle en était arrivée là,
elle demandait seulement de se débarrasser de ses symptômes
qui étaient apparus à un moment de son histoire alors
qu'il ny avait rien dautre de réellement pathologiquement
dysfonctionnel remonté à sa conscience ni à
celle du médecin. Seulement la rencontre dun tempérament
sensible et heurté par une succession dévénements
dont lun, aussi banal que les autres, mais parce que toutes
les conditions étaient fortuitement réunies, a provoqué
un accident. «Un battement dailes de papillon en Amérique
du sud est capable de provoquer un ouragan sur les Antilles».
Renforcer la compétence:
«Non, celui-là ne me fait plus rien, il est pas assez
pointu» . Alors le médecin va dans la cuisine et cherche
un couteau pointu. «Prenez-le dans les mains, faites le bouger,
regardez le bien, sentez le bien dans vos mains, que ressentez-vous?».
« - Ca va mieux, je ne ressens presque plus rien, ça
y est , ça ne me fait plus rien, il nest pas assez
grand». Alors, le médecin retourne dans la cuisine
à la recherche dun couteau grand et pointu, qu'elle
va manipuler à sa convenance, qu'elle va aiguiser ensuite
car il nest pas assez coupant. Fort de cette expérience
de rééducation, cette expérience de retour
à la compétence, elle retournera chez elle avec comme
consigne de faire la même chose chez elle avec ses propres
couteaux, afin de renforcer sa propre compétence dans son
propre milieu.
Cette phase de labord comportemental, la phase de thérapie,
ou plutôt de rééducation, de retour à
la compétence est la plus longue. Il faut prendre les dysfonctionnements
un par un, les calibrer pour aller du supportable vers ce qui était
lenfer, il faut gravir les marches dun escalier une
par une, chaque pas se traduisant par un abaissement relatif équivalent
de la marche la plus haute, celle qui permet de sortir du gouffre
et de revenir à la vie telle qu'elle aurait dû être.
Ainsi, Janine a réappris à ouvrir sa boîte aux
lettres sans crainte de coincer son fils dedans, à ne plus
avoir la crainte de bloquer un enfant dans les portes automatiques
de magasins, à conduire à vitesse normale sa voiture
dans certains virages sans la crainte décraser les
enfants présents sur le trottoir, à se servir des
prises de courant sans avoir peur de mettre ses doigts à
la place de la prise, à passer devant la maison en construction
sans plus avoir lidée de pousser et dimaginer
son fils dévaler les deux marches manquantes, à pouvoir
manipuler un couteau sans avoir cette idée obsessionnelle:
«Est-ce que je pourrais le faire». Chaque dysfonctionnement
était teinté du geste qu'elle avait effectué
lorsqu'elle avait sept ans, chaque dysfonctionnement avait la couleur
de la pensée qu'elle a eu en cueillant des fleurs. Chaque
semaine, elle pouvait mesurer le progrès effectué,
larrêt de tout médicament fut sa première
vraie victoire. Pourtant, après un an de désensibilisation,
elle gardait en elle-même une crainte dont elle navait
jamais parlée. Elle décida de se faire poser un stérilet,
et acquit alors la certitude que, puisqu'elle n'aurait jamais de
deuxième enfant, tout ceci ne pourrait plus jamais recommencer.
Bibliographie : Joseph Wolpe, professor of psychiaty Temple University
School of Medicine and eastern Pennsylvania Psychiatric Institute
Philadelphia, Pensylvania : Pratique de la thérapie comportementale,
Masson 1975, Traduction de la 2 ème édition américaine
de "the practice of behavior therapy", 1973, Pergamon
Press Innc USA.
NDLR : Ce texte est le 2ème dune série de 4
LEM intitulée Derrière la maladie qui
a été présentée dans la LEM 291, consultable
sur le site. Il donne le point de vue de son seul auteur.
l'os
court :
« Les
joies de la famille sont si délicates quil faut être
seul pour bien les apprécier » Georges Feydeau
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un autre numéro de la LEM Lettre
d'Expression médicale n°293
Hebdomadaire francophone de santé
12 Mai 2003
Derrière
les maladies (3) : abord systémique
Dr Jacques Blais
C'est une histoire de la vraie vie,
comme celles qui se présentent un jour dans le cours d'une
consultation, du suivi d'une famille connue, ou de la découverte
soudaine, par un généraliste de quartier. Parce que
c'était samedi soir, il demeurait le seul ouvert, la pharmacie
avait dit : "Allez donc essayer là-bas, cela m'étonnerait
qu'il ne soit pas encore là, et il devrait pouvoir vous aider".
Si on la résume "en partant du centre" le noyau
est représenté par Angélique, seize ans, qui
se met au fil des mois à s'enfoncer dans des symptômes
identifiables comme ceux d'une anorexie mentale. Apparaissent
autour d'elle l'oncle et la tante qui l'ont recueillie après
qu'elle ait perdu trois ans auparavant ses deux parents dans un
accident de voiture, et les deux filles de ceux-ci âgées
de 23 et 31 ans dont l'aînée est mère de famille
elle-même. Disparaissent au moins relativement dans l'environnement
d'Angélique sa grande soeur qui l'a "élevée"
depuis 3 ans mais vient de se marier, et puis ses amies, ses repères,
son nid. D'elle et du médecin consulté, qui arrive
vers qui, au fait ? Angélique qui débarque dans une
nouvelle famille, de nouveaux draps, un lycée inconnu, et
qui se met à développer des symptômes très
inquiétants, "Comme si elle tenait vraiment à
disparaître" explique fort judicieusement la tante, ou
le médecin qui entre dans la mouvance, le danger, l'angoisse,
la découverte d'un groupe ramifié élargi, familial,
comme on ouvrirait un livre, ou un placard de grenier ancien, ou
l'album de deux générations ?
Retrouver la confiance:
Parce qu'il aime se rassurer à l'aide de formules amusantes,
le médecin pense pour lui-même, à propos de
cette histoire d'anorexie, "qu'il y a à boire et à
manger là-dedans". Et du coup, poursuivant au fil des
séances de prise de contact qui, suivront, avec la famille,
il finit par se dire que cette sorte de "boule compacte de
détresse et d'amour dévorant" qui vient de se
présenter à lui pourrait être abordée
de plusieurs manières. On pourrait "l'attaquer à
la cuiller" comme si certains praticiens allaient avoir tendance
à "avaler tout crus" les dires, les affirmations,
et les conclusions des protagonistes, et des autres participants
de cette systémique, les travailleurs sociaux, l'infirmière
et le médecin scolaires, les membres de l'entourage, les
professeurs. Il serait aussi envisageable de "travailler à
la fourchette" en procédant par degrés, par pics
de forages, par morceaux, s'autorisant ainsi à observer chaque
bouchée, à analyser l'aspect, le contenu. Enfin quelques
autres professionnels seraient tentés "de n'y aller
qu'au couteau" en disséquant, en fractionnant, en opérant
jusqu'à découvrir le noyau du fruit.
Ces métaphores n'ont ici qu'un objectif, exposer le fait
que, bien souvent, le médecin consulté, impliqué,
concerné, reçoit une masse d'informations, en provenance
de sources complexes et variées, avec de surcroît,
selon son parcours personnel, son âge, sa formation, son envie
de prendre en charge ou de déléguer, son empathie,
une capacité ou une angoisse, un désir d'aider ou
un recul, une compétence monolytique ou multiple, adaptée
et expérimentée, ou complètement en dehors
du champ de cette prise en charge. Et même s'il est formé,
intéressé, compétent, impliqué, il s'interrogera.
Restaurer la conscience
Essayons de trouver quelques pistes dans cette complexité
extrême. Angélique est ici ce que l'on nomme "le
patient désigné" celle que le groupe présente
comme soit la coupable des affres du groupe, à raisonner,
ou soigner, ou neutraliser, soit la victime des circonstances, à
traiter, protéger, orienter. Angélique est la porteuse
des symptômes, ceux qui effraient et créent le danger,
Elle ne pèse déjà que 32 kilos, Jusqu'où
ira-t-elle ? Des signes qui bousculent et interrogent, On croirait
bien qu'elle provoque, agresse, se montre intraitable envers ceux
qui pourtant "ont tout fait pour l'accueillir", comment
peut-elle les traiter ainsi ?
Angélique appartient à de nombreux sous-groupes intriqués
et éloignés à la fois : son "ex-famille"
si vivace malgré la mort des parents et le mariage de sa
soeur. Sa nouvelle famille, où elle bouscule quelque peu
les parents, les deux filles, et même la nouvelle famille
de l'aînée mariée. Son lycée, ses amies,
son école de musique, la salle de gym où elle tente
encore d'aggraver sa perte de poids par ses exercices.
Il existerait trois abords possibles pour tenter de proposer des
orientations thérapeutiques répondant à deux
soucis majeurs : aider Angélique et la "sauver"
des risques extrêmes de son anorexie, et puis tenter de trouver
pour l'ensemble des personnes impliquées dans cette angoisse
symbolisée par cette sorte de "suicide progressif"
de la jeune fille des solutions thérapeutiques efficaces
et acceptables par tous.
Un abord par l'histoire d'Angélique. Sa vie, la mort de ses
parents, cette sorte d'abandon double, ressenti lors de leur décès,
et lors du départ de sa soeur pour se marier. Puis encore
l'abandon de ses amies, de ses repères d'environnement. Abord
analytique.
Un abord par le comportement d'Angélique. Elle a développé,
face à la nourriture, un comportement anormal de rejet, de
hantise, d'obsession, et un comportement tyrannique face à
son entourage, centré sur la nourriture, le poids, les repas
en commun. Souvent les anorexiques persécutent leur entourage
en devenant dominatrices, intransigeantes. Abord comportemental.
Enfin un abord par le système, l'ensemble dans lequel évolue
Angélique, avec pour objectif un changement général
des interactions, des règles internes, des alliances et des
pouvoirs.
Renforcer la compétence:
En réalité le système entier est devenu malade.
Il a développé des symptômes, angoisse de tous
les membres, réactions de tous ordres, rejet, pitié,
affolement, et surtout désignation de la "coupable",
celle qu'il faut traiter. Les frontières des sous-ensembles
ont besoin d'être redéfinies : où est l'ancienne
famille, disparue dans la mort ou dans de nouvelles implications
familiales ? Où s'arrête la nouvelle famille, intègre-t-elle
Angélique, ou remplace-t-elle la fille aînée
qui a sa propre famille ? Les "nouveaux parents" sont
ils de substitution, de parainnage, d'éducation, de responsabilité
? Que représente comme force, comme influence, comme cohésion,
comme aide, le sous-ensemble lycée-amies-loisirs-société
?
Les différents rôles, pouvoirs, autorités, alliances,
conflits, ont besoin d'être élucidés, déterminés,
éclaircis. Qu'Angélique ait perdu ses parents rend-il
coupables son oncle et tantes de ne pas pouvoir les remplacer ?
Qu'Angélique tente de disparaître à son tour
les rend-il coupables de ne pas savoir quoi faire ? Que sa soeur,
elle, décide de vivre la rend-il coupable d'abandon ou de
négligence ? L'oncle et la tante sont-ils coupables s'ils
instaurent des règles, quand Angélique n'installe
que des rituels ?
Il a paru nécessaire, dans un permier temps, de proposer
une prise en charge de thérapie familiale, avec pour objectif
la réponse à cette affirmation de départ, la
plus forte : "Cela ne peut plus durer" . La thérapie
systémique familiale va se dérouler en séances
collectives d'une par mois, avec deux thérapeutes actifs,
un dans la salle et l'autre supervisant en contrôle derrière
une glace sans tain. Les participants sont prévenus qu'ils
sont visualisés et filmés, pour conserver une possibilité
de revue, d'explication, de pédagogie, de stratégie
pour les séances suivantes. Le but est de construire
des propositions de changement. Egalement de comprendre et d'éclairer
les rôles de chacun, les courants, les alliances, les limites.
Enfin de découvrir les règles implicites qui font
fonctionner les membres les uns par rapport aux autres à
leur insu souvent.
Tout ceci pour que tout le groupe, l'ensemble, le système,
réalise qu'Angélique a besoin impérativement
de suivre un protocole habituel de traitement des anorexies, avec
hospitalisation de trois mois, contrats spécifiques de reprise
de poids, suivi psychothérapeutique, réunions de parole
des parents, projet d'avenir. Ceci sans que le groupe se sente coupable
("la pauvre, avec ce qu'elle a déjà subi !")
sans que les rôles acceptés et définis ne soient
remis en cause parce que culpabilisants ("nous ne sommes QUE
son oncle et sa tante, et nous ne pouvons pas alors..." ou
"je suis sa soeur, pas sa mère...") et sans qu'Angélique
non plus devienne coupable d'avoir traumatisé tout le monde.
Enfin pour que la déchirure de ce voile familial, recouvrant
de pudeur la douleur globale partagée, serve de source de
maturité au groupe, et non de linceul où envelopper
d'oubli le malheur.
Il serait possible de résumer ainsi. Angélique, dans
cette première approche, ne montrait aucun désir de
changer son comportement, qui lui procurait le pouvoir du danger.
Elle était jeune, traumatisée, et peu désireuse
d'aborder par analyse son histoire, ne retenant de sa vie actuelle
que le traumatisme, et les ruptures, l'abandon. Par contre le groupe
systémique exprimait très fortement un désir,
une idée : "Cela ne pouvait plus durer". Il est
apparu judicieux de proposer d'abord une thérapie systémique
à la famille. Qui a pu, comprendre, entendre, se déculpabiliser,
redéfinir les rôles de ses membres, accepter l'idée
d'une hospitalisation pour Angélique, sans culpabilité,
elle parvenant à l'accepter comme la solution thérapeutique
de changement.
Huit ans plus tard, Angélique vit avec un jeune homme, et
finit des études d'assistante sociale.
NDLR : Ce texte est le 3ème dune série de 4
LEM intitulée Derrière la maladie qui
a été présentée dans la LEM 291, consultable
sur le site. Il donne le point de vue de son seul auteur.
l'os
court :
«Il ny a pas un drame humain qui noffre
quelques aspects très gais.» Georges Feydeau
Consulter
un autre numéro de la LEM Lettre
d'Expression médicale n°294
Hebdomadaire francophone de santé
19 Mai 2003
Derrière
les maladies (4) : L'inconscient
Dr François
Michaut
La psychanalyse, chacun en a déjà entendu parler,
en utilise, souvent sans le savoir, le vocabulaire. Du refoulement
au déni en passant par les complexes ou la libido. Dans l'imaginaire
collectif, cette discipline centenaire est associée au célèbre
"divan" de Freud le Viennois et à l'histoire des
névroses illustrées par les savoureux films de Woody
Allen. Du côté des médecins du corps, par tradition
les pieds solidement ancrés dans le mesurable et le palpable,
une grande réticence entoure tout ce qui est "psychique".
Du côté des patients, le : " Votre bilan est normal.
Vous n'avez rien, tout est dans votre tête " n'entraîne
pas une intense jubilation. Et pourtant, il semble peu admissible
que seuls disposent d'un inconscient ceux qui ont besoin de faire
appel à un psy pour soulager leurs troubles. L'abord analytique
de toute situation humaine, y compris la maladie du corps et la
fonction de soignant, n'est pas un excès de langage ou une
perte de temps.
Retrouver la confiance:
Jacques
est un chef d'entreprise dynamique de 51 ans. Très sportif,
grand voyageur, amateur de musique, marié et père
de deux grands enfants. Tout va pour le mieux dans sa vie, semble-t-il.
Pourtant, au moment où il soigne une tendinite secondaire
à un excès tennistique, le médecin détecte
au cours de son examen une hypertension artérielle. Un élément
familial du même type semble avoir existé du côté
de sa grand-mère maternelle. Mais " la tension"
est une maladie si banale que bien peu de familles sont épargnées
! Le praticien, très consciencieux, effectue un bilan complet
à la recherche d'une cause éventuelle à cet
excès de tension. Tous les examens demandés, notamment
biologiques, sont normaux. Un cardiologue confirme le diagnostic
d'hypertension sans retentissement cardio-vasculaire, nécessitant
un traitement médicamenteux " à vie" associé
aux traditionnelles recommandations hygiéno-diététiques.
C'est vrai qu'il fume un peu, notre ami Jacques.
Restaurer la conscience
La pilule de la survenue de cette "maladie" est un peu
dure à avaler, c'est ce que constate son médecin traitant
au cours d'une consultation ultérieure. Lui dire qu'il s'agit
d'une "hypertension essentielle" ne calme guère
ses angoisses. Lui qui était si fier de sa forme olympique.
D'autant que certains de ses amis lui ont parlé des effets
négatifs sur leur activité sexuelle de la prise d'un
traitement semblable. Et, pour lui, le sexe, c'est très important
dans sa vie. C'est plutôt rare qu'un patient parle aussi ouvertement
de cet aspect de son intimité remarque le praticien. Un autre
rendez-vous est pris d'un commun accord pour un entretien prolongé,
afin que Jacques ait le temps de parler de lui, et de sa vie désormais
bousculée par cette "tension", avec laquelle il
va bien pourtant falloir vivre le mieux possible.
Renforcer la compétence:
Cette proposition inhabituelle pour un généraliste
de donner plus de temps à un patient pour qu'il s'exprime
correspond à un objectif bien précis. Le médecin
a appris à écouter mieux son patient, et à
la suite des travaux du psychanalyste Michaël Balint en Angleterre,
il a pu s'initier à l'importance de l'intrusion de l'inconscient
chez le patient, le médecin et dans la maladie. Quelques
années de participation à un groupe d'études
de cas avec des médecins comme lui, dit groupe Balint, ne
l'a pas transformé en psychanalyste. Il n'est pas capable
de se lancer dans une interprétation de ce que signifient
les symptômes qu'il rencontre. Il se garde même soigneusement
de le faire, ou, en tout cas de le dire à son patient ! Sinon
la limite entre manipulation et thérapeutique a été
franchie. Il sait simplement, et c'est considérable, qu'il
y a quelque chose derrière tout cela. Quelque chose derrière
l'hypertension de Jacques, qu'il doit en tout cas respecter en n'en
niant pas l'existence. Comme notre médecin est un esprit
curieux, il s'est intéressé à la médecine
dite psychosomatique, et à son excellente école de
Paris, et a lu que les sujets hypertendus étaient inconsciemment
en lutte contre leur agressivité vis à vis des autres.
Cet auto-contrôle permanent, voilà qui ferait le lit
de cette pathologie des vaisseaux . Il est bien illusoire de penser
que livrer ainsi cette "interprétation" à
Jacques serve à quoi que ce soit. Par contre, le brancher
au cours de l'entretien sur ses relations aux autres dans le travail
ou dans la vie privée, peut l'aider à exprimer quelque
chose, qu'il pourra éventuellement approfondir secondairement
avec un spécialiste "psy" s'il en éprouve
un jour la nécessité. Ce médecin "balintien"
a appris sur le tas, faute souvent d'avoir pris le soin, l'argent
et le temps, de se livrer à une psychanalyse personnelle,
que son fonctionnement inconscient intervient en permanence dans
son activité médicale, et qu'il n'est jamais le thérapeute
"objectif", "scientifique", "impartial"
qu'il est censé être dans l'opinion publique et dans
les livres. Tout médecin est avant tout un être humain,
avec tout ce que cela comporte à la fois d'extraordinaire
et de minable. Et le médecin lui-même, sa personne,
qu'il le veuille ou non, est ( Balint le dit bien) un remède.
Comme pour tout remède, avec ses indications, avec ses contrindications,
avec ses effets thérapeutiques comme avec ses effets toxiques,
iatrogènes dit-on quand on veut signifier qu'ils peuvent
entraîner une maladie.
NDLR : Ce texte est le dernier dune série de 4 LEM
intitulée Derrière la maladie qui a été
présentée dans la LEM 291, consultable sur le site.
Il donne le point de vue de son seul auteur.
l'os
court :
«
Plus fort que linconscient, tu meurs
» Cath Hoche
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