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 N° 482
 
 
 
    21 janvier 2007
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Améliorer les soins en hôpital

Photo de l'auteur Docteur François-Marie Michaut lui écrire

Ce sujet, comme beaucoup de ceux qui font l’objet de nos LEM hebdomadaires, est apparu au cours de nos discussions de la liste Exmed-1. Les techniques de soins qui deviennent de plus en plus, du fait de leur sophistication, l’apanage des établissements hospitaliers connaissent des progrès spectaculaires que nous connaissons tous. Qui ne s’en réjouirait ? Mais, hélas, de multiples questions se posent en matière de relations humaines, tant du côté des patients, de leurs familles, de leurs praticiens de ville que des soignants hospitaliers, et autres personnels qu’ils soient ou non médecins.

retrouver la confiance

Autrement dit, nous avons d’un côté une énorme machine à produire des soins qui, dans l’immense majorité des cas, fait bien son travail en terme d’efficacité technoscientifique. L’institution hospitalière en a pleinement conscience et en tire volontiers une certaine fierté. De l’autre côté, la façon dont les patients - et, à travers eux, tous leurs proches - vivent la manière dont ils sont soignés, donc aussi traités aux deux sens du terme, est infiniment moins glorieuse. Enfin, ce n’est un secret pour personne, un grand nombre de gens qui travaillent dans nos hôpitaux ne sont pas du tout satisfaits par la façon dont ils sont eux-mêmes traités par l’institution et par le sort réservé aux trop bien nommés patients. Nous sommes bien en face d’une énorme crise de confiance vis à vis des capacités de l’institution hospitalière à demeurer un endroit où l’humain est la priorité absolue.

restaurer la conscience

A écouter et à observer les uns et les autres depuis des dizaines d’années, à réfléchir sur nos différents échanges sur Internet, et sans faire à qui que ce soit le moindre procès d’intention, il semble que la place de la personne dans le système hospitalier doive être explorée. La prestigieuse machine à soigner donne si facilement l’impression de tourner comme une usine, dont tous les rouages n’ont comme finalité que de fournir des soins, comme ailleurs on fabriquerait des chaussures ou des locomotives. Le refrain habituel des malades parvenant à l’hôpital est constant : ils ont l’impression d’être avalés par une machinerie anonyme à laquelle ils ne peuvent que se soumettre sans rien dire. Analyser lucidement le système hospitalier en partant de ce que vit le patient nous semble une piste indispensable à explorer. Au delà des généreuses déclarations verbales des responsables politiques affirmant la volonté de mettre le sujet au centre des soins, osons prendre parti. Notre hôpital a un énorme défaut, qui est celui de cultiver l’idéologie que tout doit être désormais une question d’équipes. C’est une évidence pour les questions strictement techniques. Mais c’est aussi un piège pour la dimension relationnelle ( ou plus simplement humaine ) des soins aux malades. En prendre clairement conscience améliorerait déjà tellement les choses !

renforcer la compétence

Balint a fort bien démontré au milieu du XXème siècle, en travaillant pendant des années sur leur pratique avec un groupe de généralistes anglais, qu’il existe un phénomène inévitable. Quand plusieurs praticiens sont amenés à s’occuper d’un patient, la responsabilité de chaque soignant diminue obligatoirement. Cette “dilution des responsabilités” entraîne une impossibilité d’investissement complet dans la relation médicale. Le médecin - ou tout autre soignant - ne se sent pas vraiment responsable. Ce qui, soyons lucides, peut augmenter son confort personnel quand il s’agit de pathologies particulièrement sévères. Mais du côté du malade, c’est infiniment plus dramatique et lourd de conséquences. Nous ne pouvons pas nous y retrouver quand , malade, nous devons passer de main en main, chacun de nos soignants ayant son propre abord relationnel. Autant de discours, autant d’attitudes différentes devant notre propre maladie à nous, notre propre souffrance, ne peuvent que vous entretenir dans une vision confuse de ce qui nous arrive, et de ce qui nous pend demain au bout du nez . Pouvoir trouver un sens à ses accidents de santé n’est pas un des moindres moyens que le patient doit découvrir pour contribuer activement à sa guérison.
Voici, résumé en termes systémiques, l’énorme paradoxe que nous rencontrons si nous voulons vraiment être mieux soignés à l’hôpital. Le puissant système collectif de production de soins de santé doit parvenir à faire en sorte que la personne (soignante comme soignée) n’y soit justement pas considérée de fait comme ... personne. Souvenons-nous de la classique réponse à la question du médecin généraliste : “ Qu’est-ce qu’ils vous ont dit à l’hôpital de ce que vous avez ?” “ Personne ne m’a rien dit”. Alors que des dizaines de personnes en blanc ont obligatoirement croisé le patient en question et lui ont parlé.
Le débat est ouvert. Il ne saurait être clos, comme c’est trop souvent le cas dans notre pays, par la proposition incantatoire de quelques mesures conjoncturelles à grand spectacle. Que ceux qui le souhaitent, avec ou sans fonction hospitalière, prennent dans l’indispensable réflexion à pousser aussi loin que possible leur part de ... responsabilité. Oui, le mot nous y pousse : pouvoir répondre de la qualité des soins de santé. Comme pour tous nos problèmes d’humains, quand notre vision est devenue parfaitement claire, la conduite à tenir pour agir juste s’impose d’elle-même.

 


Pour ceux qui ne connaissent pas encore notre Charte d’Hippocrate.

Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html




Os court :«Les paroles seules comptent, le reste est bavardage. »
Eugène Ionesco


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