Le docteur Antoine Marie Ramarlah

20 février 2012
Dr François-Marie Michaut
lui écrire

Dominique Ramarlah a trouvé sur ce site le récit de voyage à Madagascar de Jacques Blais. . C'est ainsi qu'il a pris contact. Son père, prénommé Joseph Charles, lui même médecin malgache né en 1926, lui a remis en 1998, avant de mourir, un manuscrit en langue malgache venant de son propre père, en lui demandant de la traduire.
    Ce texte, écrit vers 1912, par le jeune docteur Antoine Marie Ramarlah est une étude sur le peuple Bara auprès duquel il avait reçu son premier poste d'affectation.
   Tout cela est raconté en détail dans un site remarquable consacré à ces Baras, si longtemps ignorés et calomniés comme de simples voleurs de zébus, alors qu'ils sont des survivants d'une très lointaine migration bantoue venant du contient africain.

Retrouver la confiance

Suivons un instant, sous la houlette de son petit-fils porteur de mémoire, les traces de notre Antoine Marie Ramarlah. Fils d'un boucher de la banlieue de Tananarive, il est né le 12 septembre 1887. Pour mémoire, la première expédition française à visée colonisatrice date de 1881. D'abord élève des Frères des Ecoles chrétiennes, Antoine commence ses études de médecine à l'âge de 17 ans . Il s'agit d'une école locale,fondée en 1897, faisant de lui le 171ème médecin malgache formé localement.
   Diplôme en poche, le jeune praticien autochtone doit, par contrat, effectuer un service en brousse au bénéfice de l'administration coloniale.
La curiosité de ce médecin, la minutie de ses observations, le respect évident pour une culture antique qui n'est pas la sienne, sont remarquables d'ouverture d'esprit. En 1912, le jeune médecin termine son travail de recherche sur les Baras, et quitte l'administration.
   Il s'installe comme médecin libéral dans la banlieue nord de Tananarive. Il est l'un des premiers praticiens à tenter cette aventure en créant lui-même sa clientèle. Marié en 1925 à une métisse corse, malgré l'opposition des deux familles, avec un premier enfant Charles, en 1926. Lui aussi deviendra médecin comme son père pour lui succéder dans le cabinet fondé dans un nouveau village créé de toutes pièces par ses soins.

Restaurer la conscience

En effet Antoine Marie (comme plus tard son fils) ne peut pas vivre des seuls revenus de sa pratique médicale libérale, notamment pour que ses enfants étudient. Il devient donc cultivateur, et travaille durement, avec de romanesques et interminables péripéties, pour constituer peu à peu son propre village. En 1931, il devient citoyen français.
   En même temps que sa pratique médicale, il poursuit d'arrache-pied ses cultures, parfois sabotées, arachides, café, coton, manioc, eucalyptus.
Le voilà, grâce à la terre, assez aisé pour que Charles, qui a 14 ans, puisse aller à l'école à Tananarive chez les Frères canadiens du Sacré Coeur.
Etudes qui se terminent en 1953 par un doctorat en médecine.

Renforcer la compétence

Les populations malgaches, surtout en milieu rural, ne disposaient pas d'argent pour payer le médecin. Bien souvent, les malades étaient soignés gratuitement. Il leur restait à charge d'acheter les médicaments indispensables, le plus souvent à l'unité. Antoine Marie Ramarlah, dit son petit fils, était de l'époque des sulfamides, alors que son père Charles, successeur de son père en 1968 en démissionnant de l'Institut d' Hygiène Sociale de Tananarive était de l'ère des antibiotiques. Mais le double métier était économiquement aussi nécessaire.
Antoine Marie cesse alors d'exercer, et deux ans plus tard, le 5 octobre 1970 meurt d'une affection cardiovasculaire.

   Pour nous en 2012, bardés de techniques et d'assurances pour tout et n'importe quoi, tout cela nous est à la fois très proche et très lointain. Un itinéraire de vie aussi libre et aussi aventureux ne peut pas laisser indifférents les adeptes de la religion du risque zéro. Une capacité d'adaptation de cette trempe, car les choses n'ont jamais été faciles pour lui, n'est pas envisageable sans le respect obstiné d'un certain nombre de valeurs humaines et spirituelles intangibles. Les Baras, si traditionnellement méprisés de leurs compatriotes, ont laissé leur empreinte indélébile.

   Je ne peux terminer ce papier, trop succinct, sans dire ma gratitude à Dominique, le petit fils, technicien de laboratoire, qui a tant travaillé pour faire connaitre, grâce à l'internet, ce médecin de haute qualité. Il m'a fourni tous les documents familiaux utiles, le cliché d'illustration de cette LEM figurant son grand-père vient de ses archives.

Os court : « La personnalité créatrice doit penser et juger par elle-même car le progrès moral de la société dépend exclusivement de son indépendance. »
Albert Einstein
Cette lettre illustre notre Charte d'Hippocrate.
Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html

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