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                | PAROLES 
                    DU TEMPS A TRAVERS LE VENT 
 Le vent a gémi, plainte doucereuse,
 De doigts réunis pointent deux cerises.
 La tige a frémi, qui chuinte, soucieuse,
 Le froid a puni l'absinthe surprise.
 
 Un homme regarde le bouquet d'arbres,
 Et ses mains sont gourdes. Mais tout est en ordre
 Et la terre hagarde encadre le marbre
 Où les voix sont sourdes. Un vent lourd vient mordre.
 
 Pour certains ce temps épèle, douce, heureuse,
 La chanson d'antan à mémoire exquise,
 Pour d'autres ce vent martèle, ombrageuses,
 Paroles d'avant sur soir de banquise.
 
 Une femme observe les candélabres
 De ces bois de charmes, qui laissent si libres
 Des idées qui servent à chasser les sabres
 Qui nettoient les larmes jusqu'à l'équilibre.
 
 La brise a mugi, onde mystérieuse,
 Un nuage aminci se matérialise,
 La bise rugit, qui fonde, impérieuse,
 L'image qui, ainsi, s'idéalise.
 
 Et les vivants laissent l'écharpe de sable
 Porter la détresse d'idées indicibles,
 Et les morts oppressent les harpes impensables
 Qui chantaient la liesse guidée vers leurs cibles.
 
 Pour qui cette brume, dense et langoureuse,
 Et pour qui la plume, si lente, indécise,
 Pour d'autres la brune danse en amoureuse,
 Et pour qui la lune qui chante, imprécise ?
 
 
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                | C'est un poème considéré 
                    comme « difficile » car il n'est pas comme la 
                    plupart d'un accès immédiat. Ceci étant 
                    lié à sa conception musicale, avec des scansions 
                    internes reprenant les sons et la versification à l'intérieur 
                    du vers, et à son thème installé sur 
                    le temps, le vent, une atmosphère générale 
                    de forêt, de brume, d'ombre, qui mène vers un 
                    mélange de sonorités tristes et de visions mortuaires, 
                    et des musiques du vent et de chants devinés. Un poème 
                    d'atmosphère, plus que d'idées et de sentiments 
                    comme à l'habitude, mais finalement l'émotion 
                    survient, comme une oppression ici, une impression là... 
                    « Et les vivants laissent l'écharpe de sable 
                    porter la détresse d'idées indicibles, et les 
                    morts oppressent les harpes impensables qui chantaient la 
                    liesse guidée vers leurs cibles ». Curieux mélange 
                    de la vie.
 
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                | ET 
                    PENDANT CE TEMPS 
 Et pendant ce temps la Terre tourne,
 Avec les évènements qui s'enfournent
 Dans les espaces entre les guerres,
 Entre plus tard, hier ou naguère,
 Et les êtres poursuivent un chemin
 Qu'ils espèrent mener à demain.
 
 Et pendant ce temps l'avenir terne
 Met sous l'éteignoir des drapeaux en berne
 Et les étendues du monde quart et tiers
 Ressemblent à autant de cimetières,
 Et la vie tente d'être un dessein
 Dont quelques lignes éclairent le dessin.
 
 Et pendant ce temps dans les urnes
 Tombent voix et cendres. En nocturne
 Les bombes à travers les tourbières
 Emplissent les tombes et mettent en bière
 Des humains qui passaient sous le grain
 Et dont ne persistera que chagrin.
 
 Et pendant ce temps la maritorne,
 Sortie d'un bar, assise sur une borne,
 Attend au port un homme sans frontière,
 Sous le vent, la pluie, la gouttière,
 Et elle espère, elle croit au lendemain
 Où quelqu'un lui tiendra la main.
 
 Et pendant ce temps, sous la lanterne,
 Ou plus loin à l'ombre d'une poterne,
 Des couples et quelques solitaires
 Ont décidé de ne plus taire
 Ces sentiments vivants et sains
 Que l'amour leur offre sans larcin.
 
 Et pendant ce temps la Terre tourne,
 Avec des jours violents qui lui chantournent
 Des décors, brisures, reliefs, rivières,
 Des fosses, bavures, cratères, civières,
 Et des êtres qui s'aiment sont en train
 De construire leur vie avec entrain...
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                | C'est un poème écrit 
                    le 25 Novembre 2001, un mois et demi après l'indélébile 
                    11 Septembre, et repris pour l'introduire dans le recueil 
                    le 22 Mars 2003, lendemain du printemps non plus de Prague 
                    comme il avait pu l'être pour nous les anciens, mais 
                    de Bagdad avec la deuxième guerre du Golfe. Ce qui 
                    signifie que la terre tourne certes, mais sans doute sur elle-même, 
                    les nations et états changent de Présidents, 
                    de tous les côtés des océans, mais le 
                    Monde ne change pas d'état d'esprit, il demeure à 
                    jamais entre deux croisades, entre trois ou quatre guerres, 
                    entre plusieurs dieux incompatibles, et entre les mains incourtounables 
                    des financiers, qui tiennent les cordons de la Bourse, et 
                    ce faisant en joue les humains, en haleine les médias, 
                    et en larmes alternant entre rage, désespoir, chagrin, 
                    deuil, ou colère d'innombrables êtres...    |  |