Big Pilule tente
un essai

19 mars 2012
Dr François-Marie Michaut
lui écrire

Pénuries vraies ou fausses dans le système gaulois d'organisation des soins de santé, peu importe. Un gigantesque jeu des chaises musicales se déroule sous nos yeux. Déshabiller Pierre pour habiller Paul, la recette est ancienne. Sa simplicité biblique séduit les gestionnaires des industries , objectif avoué, dites soignantes. Mais pas obligatoirement l'ensemble des «bénéficiaires» potentiels de ce qui ressemble à un grand match de rugby.
Impossible de recruter assez d'infirmières des hôpitaux dans les grandes régions ? Manque criant de praticiens hospitaliers publics avec nos normes légales de recrutement ? Pas de problème, pour boucher les trous, et, s'il le faut, en tutoyant quelque peu la législation du travail, nous importons massivement des soignants venant d'autres pays.
    Bien peu souvent, nous oublions de leur témoigner notre reconnaissance.
Permettez-moi, et j'ai une excellente raison personnelle de le faire, de leur dire merci de leur dévouement et de leur courage.

Retrouver la confiance

Les rangs des médecins généralistes commencent à vieillir et à s'éclaircir chez nous ? Cela devrait réjouir les successeurs des billants experts de monsieur Alain Juppé, qui, au siècle dernier, mirent en préretraite des générations de médecins pour faire des économies. Moins de prescripteurs, moins de prescriptions, donc moins de dépense. Simple comme bonjour sur le papier. Sauf que, dans la vraie vie, cela n'a rien changé au déficit sans fin de l'assurance maladie.
Moins de généralistes en France ? Rien de plus simple, il suffit de faire faire leur travail par des non médecins. Sous le Consulat, et jusqu'en 1855, fut créé le grade d'Officier de santé, avec des études simplifiées et des compétences limitées.
  Quand la diplomite aigue sévit partout, impossible politiquement et culturellement de proposer un tel retour en arrière.
Alors, comme il est impossible d'obliger par la force des gens à exercer des métiers dont ils ne veulent plus, force est de se tourner vers d'autres blouses blanches solidement implantées sur tout le territoire.

Restaurer la conscience

Les officines pharmaceutiques, voilà les sauveurs. La santé financière des pharmacies se révèle beaucoup moins brillante qu'elle ne le fut. Les prix des médicaments sont de plus en plus comprimés, les contraintes et contrôles sont en augmentation constante et de petites entreprises souffrent. «Les pharmaciens vont être payés pour leurs conseils» titre le Monde.fr du 16 mars 2012 sous la plume d'Audrey Garric. Il est même prévu que cette activité constitue à terme 25% des revenus des pharmaciens. L'idée n'est pas forcément mauvaise, et les plus anciens se souviennent du temps où, avant de déranger le médecin, il était habituel de demander au pharmacien ce qu'il convenait de faire. La modeste rémunération était la vente de quelques produits anodins, juste pour donner un peu de temps au temps. Les maladies spontanément guérissables ont toujours couru les rues !

Renforcer la compétence

Que vont bien pouvoir raconter dans leur activité de conseil nos amis pharmaciens ? Rien dans leur formation ne leur permet de formuler, même de façon très approximative, de diagnostic. Sans avis diagnostique, comment est-il possible de juger d'un traitement, et de sa pertinence ?
Connaitre les médicaments, leur fabrication, leur toxicité et les risques des interactions médicamenteuses, pouvoir déceler des erreurs dans les ordonnances médicales (les médecins sont faillibles), c'est déjà une sérieuse responsabilité.
   Demander aux pharmaciens au moyen de magiques formations toutes faites de devenir des spécialistes du suivi des traitements médicamenteux, c'est tout simplement ignorer qu'il s'agit là d'une des tâches les plus complexes de toutes les pratiques médicales.
Un diagnostic médical n'est jamais définitivement complet. Il est affiné et modifié au cours de chaque rencontre avec le médecin en fonction de l'évolution clinique de chaque personne.
Suivre un traitement n'est pas une simple routine, c'est un acte majeur qui entraine la pleine responsabilité morale et pénale de celui qui en est chargé.
Enfin, que peut-il bien en être de toute la partie non médicamenteuse de tout traitement ? La relation soignante, comme le dit ce site, ce n'est pas une vue de l'esprit. C'est une réalité de premier ordre. Vous avez dit placebo ? Mais, bien entendu, et sans médecin, point d'effet placebo possible.
   Alors patients, gardez grands les yeux ouverts, ne vous laissez pas manipuler par quelque propagande de santé d'où qu'elle vienne. Tout le monde ne peut pas tout faire. Rien ne peut remplacer la qualité humaine quand frappe la maladie.

                                            (Cliché J-C Deschamps)


Os court : « La liberté, c'est la liberté de dire que deux et deux font quatre. Lorsque cela est accordé, le reste suit»
Goeorge Orwell
Cette lettre illustre notre Charte d'Hippocrate.
Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html

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