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Il est de bon ton de faire bande à part au moment des festivités obligatoires de la fin de l'année. Flotte alors dans l'air comme un petit air condescendant de : «moi, on me la fait pas» avec cette bimbeloterie marchande, ces dégoulinements de paroles mielleuses qui nous inondent.
Qu'il existe des contestataires devant une telle unanimité apparente me semble cependant un signe évident de bonne santé des esprits. Ne parle-t-on pas de totalitarisme quand une seule façon de penser est la bonne ?
Alors quand le vent de l'époque, en dehors de la trêve amnésiante des ripailles coordonnées, est à la morosité des esprits, peut-il suffire de quelques mots roses pour sortir de la trop fameuse « crise » ?
Pas un jour ne passe sans que soit invoqué un étrange intrus dans nos relations humaines ordinaires. Il porte le nom d'une abréviation très essèmesse, pour aller plus vite. La « com ». Précédé d'un point, c'est un voyage assuré sur la Toile. Avec une inversion du m final en n, pas besoin de dessin. Traduire la (bonne) communication.
La communication, sensée capable de convaincre n'importe qui de n'importe quoi si elle est menée selon les règles standardisées des spécialistes autoproclamés, est mise à toutes les sauces. Foin de l'éloquence, du bagout, du charisme, de l'art oratoire, de l'aura intellectuelle, du talent longuement mûri. C'est du scien-ti-fique qu'on veut. C'est de l'eff-i-cace qu'on exige. C'est de l'i-mmé-diat qu'on impose.
Faut plus rigoler avec la modernité : nous sommes tous sérieux comme des papes, observez nos bobines figées dans la rue. Et, avec ou sans bulles en prime, presque aussi infaillibles dans nos convictions intimes.
Dès que peut être évoqué notre mot à la mode, il n'est pas défendu d'entendre une devinette. Que veut bien dire ce : là comme ? Introduction discrète d'une comparaison, d'une expression par analogie, symbole ou métaphore. Les théoriciens de la communication aux États-Unis dans les années 1970, dits de l'école de Palo Alto nous ont ouvert les yeux. Les avons nous lus en France avec toute l'attention qu'ils méritaient dans le domaine de la santé, et pas uniquement de la psychiatrie?
Nous restons fascinés par la rhétorique, ou l'art de convaincre par ses discours : il suffit de suivre la campagne de l'élection présidentielle.
Mais le destinataire de cette foule de messages supposés remporter notre adhésion n'est pas un recepteur passif, même s'il ne se fait pas entendre.
Il est là comme... A chacun de qualifier comment il se ressent.
Il n'est pas de bonne, ni de mauvaise, communication. Les systémiciens affirment, preuves cliniques à l'appui, que nous ne pouvons pas ne pas communiquer ! Il n'y a pas de technique, pas le moindre truc, aucune ficelle pour devenir un communicateur à succès.
Il peut y avoir des talents d'acteur, des faiseurs d'illusion, mais quand le rideau de la pièce tombe, la réalité apparait. Ne nous laissons pas leurrer par des vendeurs gominés de techniques toutes faites, gardons notre esprit critique, celui râleur et frondeur de notre histoire culturelle.
Nous sommes moroses? Acceptons cet état comme un diagnostic clinique. Allons jusqu'au bout de notre morosité sans chercher à la farder afin de nous mettre en face des réalités quotidiennes qui l'alimentent. Osons juger par nous-mêmes les comportements qui nous blessent ou nous font souffrir. Ayons le culot salutaire de ne pas nous recroqueviller dans un silence peureux quand les choses ne vont pas. Des systèmes vénérables et injustes nous laminent ? Ne perdons plus une seconde à chercher à nous en accommoder au nom de quelque loyauté historique, catégorielle ou clanique que ce soit.
Une fois encore, regardons au delà de nos frontières ce qui se passe dans tant de pays du monde et participons, à notre manière bien à nous et à nulle autre pareille, à ce vaste mouvement des peuples qui, aussi dramatique soit-il, ne montre aucun souffle d'essoufflement.
(cliché J-C Deschamps)
nos meilleures armes. »
Louis Scutenaire
Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html
